A trop présenter un peuple ukrainien uni contre un dictateur corrompu, on oublie un peu trop que la population de ce pays comporte une minorité russe,
de culture et de langue, minorité qui devient majorité quand on
considère le Sud et l'Est. Et cette minorité, tout comme la majorité du
puissant voisin qui voit dans dans l'Ukraine son berceau historique (la Rouss
de Kiev), n'est pas forcément enthousiasmée par le genre de démocratie
qui lui est imposé ces derniers jours. Par analogie, avec mille
précautions, on pourrait dire qu'une partie de l'Ukraine est à la Russie
ce que le Kosovo est à la Serbie. Mais on peut aussi dire que Poutine n'est pas Milosevic. C'est en quelque sorte ce que rappelle Philippe Grasset dans l'analyse qu'il propose aujourd'hui au sujet des développements de la crise concernant la Crimée. Extrait.
"Les idéologues mondains du bloc BAO,
qui sortent peu de leurs conférences climatisées où résonnent les seuls
dialectes anglo-saxons, ont une vision extrêmement surréaliste de la
situation russe. Ainsi de Andrew Wilson, professeur des études
ukrainiennes à l’University College de Londres et auteur de Ukraine’s Orange Revolution, le 23 février 2014 dans The Independent. Sa
thèse est que l’évolution “démocratique” en Ukraine va susciter un
“effet de domino” et entraîner une “évolution démocratique” en Russie
et un cataclysme pour Poutine. Cette thèse étrange, qui ferait penser
que la politique est devenue une annexe de ce qu’on nomme l’“art
contemporain”, se résume dans ce paragraphe...
Notre perception assez simple, sinon
évidente, est qu’il s’agit à peu près de l’inverse. Si Poutine veut
éviter des difficultés, il devra suivre une politique qui tienne compte des exigences du patriotisme et du nationalisme historique russes.
C’est-à-dire que, quelle que puisse être sa volonté de compromis, si
elle existe, Poutine ne pourra pas céder sur l’essentiel dans la crise
ukrainienne ; et le maximalisme du bloc BAO autant que des extrémistes
ukrainiens de l’Ouest font que cet “essentiel”-là ne cessera de grandir
dans ses projections et dans ses exigences pour les Russes. Ainsi, comme
le voit justement Justin Raimondo (Antiwar.com, le 24 février 2014), si
Poutine était menacé chez lui, en Russie, ce serait bien plus par sa
droite nationaliste que par le pseudo-courant démocratique et
occidentaliste, et pour la cause d'absence de fermeté en face à l'Ukraine."
Où cela nous mènera t'il ?Paula Corbulon
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