On savait déjà que les catholiques allemands avaient constitué un des
principaux foyers de résistance au nazisme –il suffit de se souvenir,
par exemple, du mouvement de résistance de la «Rose Blanche»,majoritairement composé d'étudiants catholiques, et resté notamment dans l’Histoire du fait du martyre de Hans et Sophie Scholl, qui étaient eux protestants.
Voici de nouveaux chiffres pour le prouver: deux chercheurs en économie politique, Jörg L. Spenkuch (Northwestern University) et Philipp Tillmann (université de Chicago), livrent une analyse extrêmement détaillée —vous pouvez la lire ici en PDF ou là en version abrégée—
de la façon dont le catholicisme a freiné la progression électorale du
parti nazi d’Adolf Hitler pendant la République de Weimar.
Entre 1928 et 1933, année de la nomination d'Hitler à la chancellerie, le NSDAP
est passé de 2,6% à 43,9% des voix aux élections législatives. Mais il
est resté comparativement plus faible dans les régions à prédominance
catholique, très marquées en Allemagne depuis la Paix d’Ausbourg de 1555, qui avait donné le droit aux seigneurs locaux d’imposer leur religion à leurs sujets.
Mais cela était-il dû au catholicisme en lui-même, ou au fait que les
catholiques allemands présentaient un profil économique (davantage de
paysans) et géographique (davantage présents dans le sud et loin des
grandes villes) que les protestants? Pour en avoir le cœur net, les deux
chercheurs ont mené une analyse croisée des résultats des élections au
niveau local (comtés et municipalités) et des variables
socio-économiques (religion, CSP, emploi…).
Conclusion :
«La religion est le facteur prédictif le
plus important du vote nazi. Plus spécifiquement, la composition
religieuse des circonscriptions explique un peu plus de 40% de la
variation du résultat du NSDAP au niveau d’un comté. […] Toutes choses
égales par ailleurs, les protestants étaient au moins deux fois et demi
plus enclins à voter pour les nazis que les catholiques.»
Pour expliquer ce résultat, les chercheurs éliminent statistiquement
plusieurs facteurs (la supposée «religiosité» plus grande des
catholiques, qui les aurait rendu moins réceptifs au paganisme nazi, ou
un rapport à l’autorité politique différent...) pour se concentrer sur
l’attitude de la hiérarchie catholique. Très liée au Zentrum,
le parti de centre-droit catholique, celle-ci a pris à l’époque,
contrairement à son homologue protestante, des positions offensives
contre les nazis, en interdisant à ses fidèles d’adhérer au parti.
«Celui qui vote pour Hitler devra le justifier le jour du Jugement
dernier. Il n’y a pire péché que voter pour lui!», a ainsi déclaré un
jour le curé de Waldsee, une ville de Rhénanie. Jörg L. Spenkuch et
Philipp Tillmann ont d’ailleurs observé, là encore toutes choses égales
par ailleurs, un taux de vote pour les nazis nettement supérieur dans
les villages dont les curés se montraient «sympathisants» envers le
parti hitlérien.
Des prêtres qui ont été rejoints, après mars 1933, par la hiérarchie catholique allemande, qui s'est ralliée au régime —un reflet de l'attitude parfois ambiguë de l'Église envers le régime, y compris en dehors d'Allemagne.
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