jeudi 8 février 2024

Remise en liberté de l’assaillant d’une école : une aberration légale

 

Ce lundi matin, un homme sous OQTF a tenté d’attaquer des enfants dans une école maternelle parisienne. Mais les plus hautes autorités de l’État ne se sont pas déplacées en masse contre cette attaque « au cœur de la République » de très jeunes enfants. La Justice a fait le contraire de ce que l’on pourrait attendre d'elle : elle a tout simplement libéré l’auteur de l’acte.

Retour sur une décision judiciaire invraisemblable au profane encore doté de bon sens, mais tout à fait explicable, voire prévisible, dans l’état actuel du système judiciaire.

« Enfants, enfants ! »

Après avoir dérobé une clé, ce trentenaire tunisien, sous OQTF, est parvenu à entrer dans la cour de l’école à l’heure où les premiers enfants arrivaient. Affolés, les employés ont décidé de confiner les trente enfants déjà présents dans un gymnase et de fermer l’entrée de l’établissement. Mais l’individu ne s’arrête pas là. Il tente ensuite d’escalader la terrasse qui donne sur le gymnase.

Le directeur de l’établissement prend alors la décision d’appeler la police et, dans un premier temps, le père d’une des jeunes élèves, policier hors service, pour qu’il protège les enfants. Le parent d’élève accourt, muni de son brassard police et de son arme de service, en quelques instants. Arrivé sur la zone, il met en joue l’attaquant et lui ordonne de s’agenouiller. Il faudra le renfort de près d’une douzaine de policiers et une dizaine de tirs de taser pour enfin immobiliser l’homme extrêmement dangereux...

Selon le journaliste Amaury Bucco qui a révélé cette affaire, l’homme portait sur lui deux lames de couteau. Lorsqu’il a été arrêté par la police, il aurait crié « enfants, enfants ».

Ce qui en dit long sur le drame auquel ces enfants ont échappé.

Libre comme un homme sous OQTF !

Mais à la gravité des faits - comment est-il concevable que de très jeunes enfants puissent être la cible d’une personne censée ne pas être sur le territoire français ? - s’ajoute, une fois de plus, le scandale du traitement de l’auteur des faits.

D’un point de vue judiciaire, d’abord, suite à son arrestation, l’homme sous OQTF a naturellement été placé en garde à vue. Mais, surprise : après avoir été présenté au procureur de Paris, cet homme n’a pas été placé en détention provisoire avant son jugement le 27 février.

Ce qui veut donc dire que cet homme est libre pour (au moins) encore un mois. Il y a donc un homme qui se promène dans Paris, armé de couteaux à la recherche d’écoles maternelles ou d’enfants, avec la bénédiction de la Justice.

Pire : étant désormais en cause dans une procédure judiciaire, il devient tout simplement impossible de l’expulser puisque (la préfecture l’a assuré au journaliste) la Justice l’oblige à demeurer sur le territoire. Il ne peut donc être conduit dans un centre de rétention administrative pour être expulsé.

Encore une fois, la sanction, sous sa forme judiciaire ou administrative est tout simplement impossible.

Une libération aussi aberrante que légale

La libération de cet homme est extrêmement étonnante, même pour les observateurs habituels de la Justice. Mais il se pourrait qu’elle soit parfaitement légale.

En effet, en droit, la décision de placer une personne en détention provisoire est supposée être exceptionnelle. Ce qui est logique dans un monde idéal, sans délai judiciaire. Ainsi, la loi prévoit que la détention provisoire ne peut être prononcée que pour des actes graves, pour lesquels le suspect encourt trois ans de prison au moins. En l’occurrence, cela semble pourtant être le cas : l’intrusion dans un établissement scolaire avec arme est un délit puni de trois ans de prison.

Mais en réalité, cette décision est probablement légale.

En effet, un autre article du Code pénal énonce limitativement les cas dans lesquels un juge peut prononcer une détention provisoire. Ainsi, même si, dans la pratique, eu égard notamment aux longueurs de la Justice, les juges prononcent des détentions provisoires pour une majorité des personnes dangereuses, il n’est pas certain que ce Tunisien sous OQTF entre parfaitement dans un des cas énumérés par l’article. Et un juge peut donc avoir légalement décidé que cet homme ne devait pas être placé en détention provisoire.

Que cette décision soit légale est tout le problème. Comment le Parlement a-t-il pu en arriver à voter de telles dispositions ? Devant le marasme sécuritaire et les scandaleux délais judiciaires, comment peut-on permettre un usage si restrictif de la détention provisoire ? Toute personne qui a prouvé sa dangerosité devrait être placée en détention provisoire dès lors qu’elle est soupçonnée d’un crime ou délit grave.

En fin de compte, cette décision de libération illustre parfaitement la dimension judiciaire de la décadence occidentale. Un État qui, pour des raisons sombrement juridiques, permet de telles aberrations est un État décadent… Il serait temps de se relever.

Pierre-Marie Sève

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