samedi 8 décembre 2012

Benoît XVI et la christianophobie » musulmane

l y a un peu plus de cinq ans, peu de mois après l'élection de Benoît XVI, Michel De Jaeghere publiait une Enquête sur la Christianophobie (Renaissance Catholique) pour mettre en lumière un des faits majeurs de notre temps : malgré la tolérance grandissante dont a fait preuve l'Église en bien des domaines, malgré la liberté des consciences en matière religieuse qu'elle a définie au concile Vatican II, l'anticléricalisme n'a pas disparu. Ou plutôt, selon la formule du cardinal Bille, alors primat des Gaules, lors de la conférence des évêques de France à Lourdes, en novembre 2000, se développe « une sorte d'antichristianisme contre lequel l'évocation de ce que notre civilisation peut devoir au christianisme s'avère peu opératoire ».
Michel De Jaeghere appelait « christianophobie » le phénomène qu'il décrivait avec brio : « une contestation, une haine du catholicisme, de sa doctrine, de son histoire, de ses fidèles ».
Pour la première fois, Benoît XVI a repris ce terme de « christianophobie ». C'était le 20 décembre, dans le traditionnel discours de fin d'année à la Curie romaine. Il employait le mot en référence au sort des chrétiens au Moyen-Orient, « Nous sommes témoins avec épouvante, disait le Pape, d'actes de violence dans lesquels ce qui est sacré pour l'autre ne se respecte plus, dans lesquels même les règles les plus élémentaires de l'humanité s'écroulent. Dans la situation actuelle, les chrétiens sont la minorité la plus opprimée et tourmentée. »
Il y avait eu, quelques mois auparavant, le 31 octobre, l'attentat contre la cathédrale syriaque de Bagdad qui avait tué 46 fidèles ; le plus meurtrier d'autres attentats et assassinats qui ont visé les chrétiens en Irak. Depuis le discours du Pape, il y a eu encore, le 1er janvier 2011, l'attentat contre une des églises coptes d'Alexandrie qui a fait 21 victimes. Et l'on n'évoquera pas la longue liste des pays, tous musulmans, du Maroc au Pakistan, où les chrétiens sont persécutés à des degrés divers : punition pour les convertis, expulsion des missionnaires, ou exécutions légales, assassinats et attentats.
Tariq Ramadan, un des idéologues de l'islamisation de l'Europe, estime que « la peur de l'Islam s'est installée en Occident, à cause de la nouvelle visibilité des musulmans », et que, dans les attentats anti-chrétiens, « l'Islam n'est pas le problème ». Il met en cause « des groupes extrémistes violents ».
Appel aux responsables politiques et religieux
Evidemment, Tariq Ramadan fait une analyse mensongèrement irénique de la situation. On n'assimilera certes pas les pays musulmans qui votent des lois anti-chrétiennes (loi contre le prosélytisme au Maroc et en Algérie, loi anti-blasphème au Pakistan, etc.) aux actions terroristes menées par des groupes indépendants des États. Mais il y a bien une orientation générale de l'Islam qui est hostile aux chrétiens. Dans le meilleur des cas, les autorités des pays concernés cherchent à restreindre le plus possible l'influence et l'apostolat des chrétiens. Ailleurs, c'est l'interdiction, la punition ou l'impunité laissée aux plus violents, aux plus « extrémistes ».
Le vaticaniste Sandro Magister, faisant référence au célèbre Discours de Ratisbonne en 2006, relevais il y a peu, combien « la proposition "raisonnable" du pape aux musulmans continue à ne pas être entendue ». Il estimait aussi que « l'actuelle "stratégie de violences" antichrétienne est la preuve que le monde musulman est dramatiquement éloigné de cette révolution des Lumières souhaitée par le pape Benoît XVI ».
Benoît XVI n'est pas dans une posture naïve face à l'Islam. Dans son discours du 20 décembre dernier, il n'attribue pas la « christianophobie » musulmane à des groupes extrémistes. Il voit bien que c'est, selon les cas, une politique étatique et/ou religieuse. En conséquence, espérant contre toute espérance, il lance, dit-il, « un cri fort adressé à toutes les personnes qui ont une responsabilité politique ou religieuse pour qu'ils arrêtent la christianophobie ; pour qu'ils se lèvent pour défendre les réfugiés et ceux qui souffrent et revitaliser l'esprit de la réconciliation ».
Yves Chiron Présent du15 janvier 2011

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