Les 24 et 25 février,
les italiens se sont rendus aux urnes pour renouveler la Chambre et le
Sénat après presque un an et demi de direction anti-démocratique du
banquier européiste Mario Monti.
C’est une Italie
meurtrie par l’austérité, soumise au chômage des jeunes ou aux suicides
des petits patrons qui se rendait aux urnes. Quatre coalitions (ensemble
de partis derrière un parti principal) étaient favorites. La coalition
de centre gauche menée par le Parti démocratique (équivalent du PS) de
l’ancien communiste Bersani , la coalition de droite menée par Silvio
Berlusconi et le Parti de la Liberté (équivalent de l’UMP), la coalition
du centre menée par Mario Monti à laquelle était rallié Gianfranco Fini
et enfin le parti populiste « de gauche » de Beppe Grillo, humoriste
italien, fer de lance du Mouvement 5 étoiles (pour eau, transport,
environnement, connectivité et développement). De fait, premier constat,
aucun parti d’extrême-droite ou d’extrême-gauche traditionnel n’était
annoncé comme potentiellement outsider du scrutin.
1) Une Italie ingouvernable
Le premier bilan de
ces élections, est que l’Italie est ingouvernable. A la Chambre, la
coalition de centre-gauche arrive en tête avec 29.5% des voix devant la
coalition de droite qui parvient à réunir 29.1% des voix. La vague rouge
n’a pas eu lieu et la droite résiste bien, déjouant une nouvelle fois
tous les pronostics. Silvio Berlusconi réussit son retour avec un
discours hostile à l’Euro et italo-centré lui ayant permis de fédérer
quelques officines de la droite radicale italienne comme la Lega Nord
(régionaliste) et la Destra (proche du FN). Son discours est qualifié de
« populisme de droite », une façon polie de dénoncer un discours aux
« relents fascistes ». Le Cavaliere ne s’est pas privé d’ailleurs de
commettre un « dérapage » louant les réussites sociales du fascisme. Au
Sénat les scores sont également très serrés, toujours en tête la gauche
réunit 31.6% des voix et la droite la talonne avec 30.7%.
L’instabilité est renforcée par les scores du Mouvement 5 étoiles (M5S) de Beppe Grillo avec 25.5% à la Chambre et 23.8% au Sénat. Ce dernier a réussi son pari et devient la troisième force du pays. Bien qu’ancré à gauche par un discours sur la réduction drastique du temps de travail, mais également anti-impérialiste et pacifiste, le comique italien fait nettement moins rire l’intelligentsia lorsqu’il demande la sortie de l’Euro et s’oppose au droit du sol ou encore critique l’immigration. Flattant l’esprit de nos vieux soixante-huitards de journalistes, sa réussite est également du à son discours protectionniste. Grillo a surement attiré des déçus de la politique (seuls 15% des Italiens croyaient encore aux hommes politiques avant les élections) mais aussi des électeurs issus de la droite et de la gauche, attachés à une certaine justice sociale. Grillo, qui ne peut pas lui-même être élu, devra donc compter sur ses lieutenants et tenir la barre pour éviter des alliances qui nuiraient à son discours. De toute évidence, aucun des deux camps ne peut se passer du quart des voix et la crise politique italienne ne fait que débuter.
L’instabilité est renforcée par les scores du Mouvement 5 étoiles (M5S) de Beppe Grillo avec 25.5% à la Chambre et 23.8% au Sénat. Ce dernier a réussi son pari et devient la troisième force du pays. Bien qu’ancré à gauche par un discours sur la réduction drastique du temps de travail, mais également anti-impérialiste et pacifiste, le comique italien fait nettement moins rire l’intelligentsia lorsqu’il demande la sortie de l’Euro et s’oppose au droit du sol ou encore critique l’immigration. Flattant l’esprit de nos vieux soixante-huitards de journalistes, sa réussite est également du à son discours protectionniste. Grillo a surement attiré des déçus de la politique (seuls 15% des Italiens croyaient encore aux hommes politiques avant les élections) mais aussi des électeurs issus de la droite et de la gauche, attachés à une certaine justice sociale. Grillo, qui ne peut pas lui-même être élu, devra donc compter sur ses lieutenants et tenir la barre pour éviter des alliances qui nuiraient à son discours. De toute évidence, aucun des deux camps ne peut se passer du quart des voix et la crise politique italienne ne fait que débuter.
2) Les perdants du scrutin
Première victime de ce
scrutin, Mario Monti avec 10.5% des voix à la Chambre et 9.1% au Sénat,
qui a payé sa politique pilotée par les banques et l’UE. Et malgré le
soutien du Vatican, toujours prompt à semer la zizanie dans la politique
italienne, c’est un véritable désaveu pour « le Professeur » dont les
italiens semblent se passer assez sereinement des cours d’austérité.
Cela n’empêchera pas les zélateurs de l’UE et les démagogues aux mains
de la finance de fustiger des Italiens qui ne veulent pas se serrer la
ceinture et sombrent dans le « populisme ». Surtout cela ne fait que
confirmer le caractère illégitime du gouvernement Monti sortant,
parachuté sans élection suite à la démission de Berlusconi (pilotée très
probablement depuis l’UE et le Vatican). Le « coup d’Etat » de Goldman
Sachs aura fait long feu.
D’autres partis ont
sombrés dans ce scrutin. Fini est surement bel et bien… fini, son parti
n’attire que 0.5% des voix à la Chambre. Pour l’ancien responsable
d’Alleanza Nazionale et ancien allié de Berlusconi, il semble que les
Italiens lui montrent le chemin de la sortie. Les trahisons ne paient
pas. Une leçon que doivent méditer tous les nationalistes qui voudraient
vendre leur âme à la droite ou au centre… mais surtout à l’oligarchie.
La
Lega Nord qui parvenait à obtenir d’excellents résultats dans le nord
du pays avec un discours régionaliste et hostile à l’islam avait
rapporté 8.3% des voix à la coalition de droite en 2008 contre 4.1% à la
Chambre lors du dernier scrutin. Quelques scandales auront surement
joué en sa défaveur, de même qu’une politique immigrationniste assez
surréaliste pour un parti soit disant anti-immigration… mais les
électeurs du nord ont été impitoyables. Dans la circonscription du
Veneto 1 par exemple, la Lega était première avec 28.2% des voix en 2008
alors qu’elle récolte 10.5% des voix sur le scrutin du week-end
dernier. Elle parvient tout de même à un honorable 17.5% en Lombardie 2,
mais loin du très beau 31.3% du scrutin précédent.
3) L’inexistence des « extrêmes»
D’autres résultats sont plus surprenants, la Destra de Storace obtient 0.7% des voix à la Chambre et 1.8% dans la circonscription du Lazio 1… alors que Storace était le leader de la coalition dans la région. Le vote a clairement bénéficié au PdL (20.6%) et l’électorat aurait pu propulser Storace à la Chambre tout en appuyant le PdL au détriment de son parti « plus à droite ». La constellation des partis de droite radicale (Forza Nuova – 0.3%, Fiamma Tricolore – 0.1% et Casapound – 0.1% à la Chambre) n’aura pas profité de la crise italienne pour gagner des sièges. Il en va de même à gauche où le Parti Communiste des travailleurs obtient 0.3%.
Les italiens ne
semblent pas favorables à confier leur destin à des partis trop marqués
idéologiquement. La réussite de Bepe Grillo et le retour en fanfare de
Berlusconi illustrent surtout d’après mois une forme de « nihilisme »
politique, renforcé par une participation en baisse (75.18% à la Chambre
et 75.21% au Sénat). Les médias pourront qualifier Grillo de
« populiste de gauche » et Berlusconi de « populiste de droite », la
réalité est que l’un n’est pas communiste et que l’autre n’est pas
fasciste.
Aussi les Italiens ont
choisis de voter pour des personnalités : Bersani, Berlusconi, Grillo
ou Monti, les candidats novices ou moins médiatiques ont eu des
difficultés à gagner la confiance d’un électorat en déroute. Cela est
surement accentué par une crise générationnelle. Le vote au Sénat ne
concerne que les plus de 25 ans, et nous constatons un recul de voix
pour Casapound entre la Chambre et le Sénat, du fait que le mouvement à
la tortue fléchée est un mouvement tourné vers la jeunesse urbaine qui
ne constitue pas, loin s‘en faut, la majorité de l’électorat. De là une
telle dichotomie entre des élections lycéennes et étudiantes favorables
au Blocco Studentesco (syndicat lycéen et étudiant de Casapound) à Rome
et des élections nationales plutôt très défavorables au mouvement.
Peut-être cette crise générationnelle a aussi joué pour Bepe Grillo dont
le score est un peu moins fort au Sénat qu’à la Chambre.
Les partis
« populistes » ont besoin pour exister d‘un tribun, comme l’illustre la
réussite des partis comme le Front de gauche, le Front national, l’Aube
Dorée et le M5S. Bien que Syriza en Grèce ait pu démontrer le contraire,
les peuples continueront encore et toujours à adhérer à une « figure »
lorsqu’ils perdent leurs repères politiques. C’est ce qui aura permis à
Silvio Berlusconi, tout comme à Nicolas Sarkozy d’exister politiquement
malgré les cabales médiatiques.
Au fond le principal enseignement de ce scrutin, c’est qu’il n’est pas nécessaire d’avoir un corpus idéologique cohérent pour réussir électoralement, les grands partis et les grandes figures médiatiques tirent leur épingle du jeu, comme c’est le cas avec les conservateurs en Grèce alors qu’on se demande bien que peut croire que les conservateurs vont régler la crise Grecque… Ici aussi on a du mal à croire que Bersani ou Berlusconi auront les clefs du redressement de l’Italie.
Jean
Note du C.N.C.: Toute reproduction éventuelle de ce contenu doit mentionner la source.
Au fond le principal enseignement de ce scrutin, c’est qu’il n’est pas nécessaire d’avoir un corpus idéologique cohérent pour réussir électoralement, les grands partis et les grandes figures médiatiques tirent leur épingle du jeu, comme c’est le cas avec les conservateurs en Grèce alors qu’on se demande bien que peut croire que les conservateurs vont régler la crise Grecque… Ici aussi on a du mal à croire que Bersani ou Berlusconi auront les clefs du redressement de l’Italie.
Jean
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Résultats à la Chambre: Repubblica.it
Résultats au Sénat: Repubblica.ithttp://cerclenonconforme.hautetfort.com/
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