"La vie est dure. Très dure. La réalité est cruelle. Horriblement cruelle. Notre confrère Edwy Plenel n’a cessé, tout au long de sa carrière de journaliste, de dénoncer la France moisie.
Cette France des boutiquiers affalés au comptoir du bistrot qui ne
cessent de geindre. Contre les étrangers. Contre les charges. Contre les
fonctionnaires. Contre le fisc. Cette France poujadiste qui n’a pas
compris que le monde a changé et qui se cramponne égoïstement à son
tiroir-caisse. Et puis… Un beau matin, le donneur de leçons a
rejoint la cohorte des héritiers du papetier de Saint-Céré. Il a
découvert la réalité du contrôle fiscal. Il n’en est pas en core revenu.
Dans la France du XXIe siècle, tout contribuable peut être con trôlé
par l’administration fiscale. Tous les contribuables. Les petits comme
les gros. Les anonymes comme les opposants politiques. Ceux qui ont
triché comme ceux qui n’ont rien à se reprocher.
Le moustachu est furieux. Il considère
que la presse en ligne a droit à une TVA au taux de 2,1 %, comme la
presse écrite. Les services de Bercy sont d’un avis contraire. D’où une
vérification de comptabilité et l’envoi immédiat d’une proposition de
rectification. Le tombeur de Cahuzac vitupère. Le contrôle a été bâclé. L’addition s’élève à plus d’un million d’euros.
La proposition de rectification a été signifiée pour interrompre la
prescription. Les redressements sont assortis d’un intérêt de retard au
taux de 4,80 % par an et d’une majoration de 40 % pour « manquement
délibéré ». En d’autres termes: pour mauvaise foi. À plus de 60 ans,
l’ancien directeur de la rédaction du « Monde » découvre la vie. La
vraie vie. Il dénonce « le secret opaque de la haute administration du ministère des Finances », une « offensive fiscale déloyale et partiale », « les montants stupéfiants réclamés par le fisc »! Il y oppose les emplois et la « richesse collective » créés par son site, avec « la seule vertu du travail »! Quelle blague ! Scandaleux, les procédés des services fiscaux contre Médiapart ? On ne voit pas en quoi.
Ce sont les méthodes utilisées depuis des décennies contre des dizaines
de milliers de contribuables sans qu’Edwy Plenel n’ait jamais senti le
besoin de les dénoncer. [...]
Voici pourtant l’ancien journaliste à «
Rouge » au milieu des commerçants et des artisans bougons qui râlent. Il
ne les connaissait qu’à travers son prisme idéologique. Il est
désormais assis sur le même banc qu’eux. Et sa défense est la même. Le
pouvoir de l’administration est arbitraire. L’État veut sa peau. Il est
traité comme un voleur. Jamais il ne pourra payer ce que Bercy lui
réclame. Son entreprise va mettre la clef sous la porte. Il crie à
l’injustice. A la persécution. Il lance une pétition. On croirait
entendre du Poujade teinté de Nicoud et de Bloch-Morhange. [...]
Victime du fisc, Plenel dénonce
désormais l’hydre fiscale. Il est assurément sur la mauvaise pente. Une
célèbre boutade veut qu’un électeur de Le Pen soit juste un communiste
qui se soit fait cambrioler deux fois. A son premier contrôle fiscal, un
ancien trotskyste peut-il également devenir un supporter de la bête
immonde? Et s’il se fait demain péter la gueule au coin de la rue par un
immigré, il va se mettre à dénoncer les méfaits de l’immigration ?
[...]"
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