mardi 16 février 2016

Pour une « nation forte »

« Comment imaginer une rencontre heureuse entre un islam fort et une nation faible ? » Cette question posée par Pierre Manent dans Situation de la France (1) résume admirablement l’une des problématiques cruciales du moment. Pour autant, l’essayiste ne se fait en rien le chantre d’un identitarisme agressif. Il prône même certaines concessions sur les mœurs musulmanes, à condition toutefois que la nation soit forte. Quelle est la substance d’une « nation forte », au-delà de la dimension géopolitique et militaire, au-delà de la puissance économique ? Elle recouvre principalement trois aspects : politique, culturel et religieux.
La nation de marque chrétienne Au plan religieux, Pierre Manent conclut son essai en affirmant que « l’avenir de la nation de marque chrétienne est un enjeu qui nous rassemble tous » (p. 173). Tous ? Vraiment ? Y compris les non-chrétiens ? Pour Manent, la réponse est positive parce que « la France n’a jamais été sans l’Église » (p. 161). L’auteur est ici particulièrement audacieux. Cela revient à dire aux Français : « Vous n’aurez pas la France sans le catholicisme. Ou alors ce sera une nation faible et désarmée face à la formidable dynamique de l’islam. » D’une certaine manière, pour les Français, la neutralité vis-à-vis de la religion n’est plus tenable. Et elle l’est encore moins, bien sûr, pour cette majorité de Français qui se déclare catholique sans vivre explicitement sa catholicité. Cela signifie peut-être que les Français gagneraient à redécouvrir le catholicisme ; et plus encore, pour ceux qui sont baptisés, à se redécouvrir catholiques.
Sortir de la neutralité religieuse ne peut cependant pas se réduire à la redécouverte de la manifestation culturelle de la religion. Benoît XVI a démontré, lors de son discours aux Bernardins, que c’est la foi qui produit la culture ; et que sans la foi la culture se meurt. L’actuel pape émérite avait alors insisté sur ce moteur de la civilisation et de la culture que constituait la recherche de Dieu – Quaerere Deum. Il serait ainsi illusoire de penser que le retour à la religion historique conçue comme « religion identitaire » suffirait à refaire de la France une nation forte. Si l’on n’y met pas l’âme, la foi, les fondations demeureront fragiles. Voilà pourquoi nous ne devons pas hésiter à parler explicitement à nos contemporains de la question religieuse. Les Français sont peut-être placés, à ce moment de leur histoire, devant un choix crucial : ou retrouver leur baptême ; ou alors leurs enfants ou petits-enfants pourraient devenir musulmans demain, si la prophétie de Houellebecq venait à se réaliser. Le romancier défend en effet la thèse selon laquelle le vide religieux ne peut durer parce qu’il n’y a pas de société sans religion. En somme, il est essentiel pour les Français de se remettre à chercher Dieu, de retrouver le chemin de l’Église et des églises. [....]
La suite dans La Nef

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