Yvan Rioufol analyse le scrutin italien pour le Figaro :
"Plus les avertissements électoraux se multiplient, plus les dirigeants et leurs médias dénoncent la montée du "populisme". Dans leur vocabulaire, ce mot vaut disqualification, alors même qu’il est l’expression de la démocratie. Jamais l’oligarchie n’a été à ce point coupée des gens. Les alertes que ne cessent de lancer les Britanniques, les Américains du nord, les Polonais, les Danois, les Autrichiens, les Français etc. persistent à ne pas être comprises par une caste persuadée d’avoir raison. Le dénominateur commun du réveil des peuples est partout le même : un refus d’aller plus loin dans l’ouverture à une immigration de peuplement qui ne s’intègre plus, sinon à la marge. Ce faisant, c’est la philosophie même de l’Union européenne, construite sur l’ouverture des frontières et le multiculturalisme, qui est chaque fois un peu plus remise en question. L’humanitarisme et l’universalisme, ces valeurs dont se gobergent les adeptes de la mondialisation, sont rejetées par une large partie de l’opinion européenne. Il va bien falloir que cette évidence, partagée de l’est à l’ouest de l’UE, soit prise en compte dans les politiques décidées à Bruxelles.
Les résultats des législatives italiennes, tels qu’ils se lisent ce lundi à midi alors que le scrutin n’est pas encore totalement dépouillé, s’inscrivent dans cette vague souverainiste et protestataire. En l’occurrence, elle a été amplifiée par le fiasco libyen qui a fait se déverser des milliers de clandestins musulmans sur les côtes de la Péninsule. C’est cette même vague de fond qui a ébranlé Angela Merkel en Allemagne après sa politique migratoire insensée de 2015 : sa coalition gouvernementale a été bouclée ce week-end avec des bouts de ficelles. Mayotte, submergée par une immigration illégale, est gagnée à son tour par un mouvement de contestation populaire contre l’insécurité. La nouvelle dynamique n’est plus celle des luttes sociales. Elle est celle des luttes identitaires. Elles opposent un peu partout, pour reprendre la distinction proposée par le politologue britannique David Goodhart, "ceux de n’importe où" à "ceux de quelque part". La Macronie, ce club de belles âmes qui se pince le nez devant les "ploucs" trop lucides, serait bien inspirée d’écouter ce que disent les peuples européens excédés."
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