mercredi 30 janvier 2019

Alain Bauer : « Certaines de ces armes, notamment les grenades de désencerclement, devraient être interdites en maintien de l’ordre »

Depuis le début des manifestations de gilets jaunes, on voit un nombre important de blessures graves dues à des tirs de LBD. Peut-on parler d’usage disproportionné de la force ?
Il y a trois problèmes distincts en maintien de l’ordre :
– le type d’armes utilisés ;
– la manière dont elles sont utilisées ;
– par qui elles sont utilisées.
Certaines de ces armes, notamment les grenades de désencerclement, devraient être interdites en maintien de l’ordre et d’autres devraient être modifiées ou remises dans un état antérieur (puissance de tir réduite et diamètre augmenté).
Certains de ces équipements ne sont pas utilisés dans des conditions convenables, notamment du point de vue du fabricant.
Enfin, elles ne devraient être utilisés en maintien de l’ordre que par des CRS et des gardes mobiles de la gendarmerie.
De manière générale, la violence vécue d’un côté comme de l’autre lors de ces manifestations va de pair avec une communication assez fébrile de la part du gouvernement. Y voyez-vous une corrélation ?
Non. Le gouvernement voit les centaines de blessés dans les forces de l’ordre dont il faut souligner le professionnalisme et la maîtrise, surtout chez les forces mobiles. Les manifestants, souvent engagés dans leur première manifestation, découvrent l’envers du décor et sont douloureusement surpris par la réalité violente des jacqueries à la française et de la riposte des autorités. Et chacun communique en interne plutôt qu’en général, ce qui provoque ce sentiment de communication « en mono » plutôt qu’en stéréo.
De nombreux officiers de police se plaignent des ordres reçus pour juguler ces manifestations. De manière générale, comment jugez-vous le maintien de l’ordre lors de ces manifestations de gilets jaunes ?
Cela dépend qui donne les ordres. On note des instructions très professionnelles mais avec des effectifs épuisés ou non professionnels, et l’inverse. C’est la durée et la violence de ce mouvement qui coagule les colères plus qu’il ne conjugue les luttes qui pose le problème d’une adaptation régulière à la réalité d’un mouvement déstructuré et multiple, très « gaulois ».
Vous aviez déclaré, sur France 5, qu’Emmanuel Macron « n’a pas compris qui il avait en face de lui » en parlant des gilets jaunes. Pourquoi cette analyse ?
Elle portait sur un commentaire attribué au chef de l’État sur l’idée que ce mouvement était surtout composé d’inactifs. Il s’agit, selon moi, d’un mouvement de travailleurs pauvres ou appauvris, de classes moyennes en voie de paupérisation, mais aussi de retraités. Leur sujet est moins le travail que le revenu. Et sans doute le respect.

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