La relative faiblesse de l'extrême-gauche sur le plan électoral est largement compensée par un poids non négligeable sur nombre d'échelons de la société. Il est vrai que ces gens là sont sérieux et motivés. Le contraire des militants d'extrême-droite qui restent bien trop souvent des braillards-bavards dont l'engagement politique s'apparente à un grand jeu de rôle. Et qui confondent encore bien souvent agitation, activisme et révolution.
Il est vrai que la motivation implique de faire des efforts, de donner du temps, de l'argent, des compétences, de l'énergie, du dévouement gratuit à une cause qui nous dépasse et pour laquelle sont morts de grands Anciens. Quant au sérieux, il signifie organisation, méthode, utilisation d'outils qui fonctionnent autocritique, remise en cause, implication totale discrétion. Voici quelques exemples recueillis auprès d'anciens et actuels militants d'extrême-gauche :
✔︎ Leurs partis, associations, collectifs se réunissent très fréquemment, discutent débattent, échangent et mettent en place actions, tactique, stratégie. Ils se connaissent entre eux et savent comment utiliser au mieux chaque compétence et donner de la cohésion à une communauté de combat Les échanges sur internet ne se substituent pas indéfiniment aux discussions de groupe. Un ancien de l'Organisation communiste internationaliste (lambertiste) me disait récemment qu'ils se réunissaient parfois quatre à cinq fois par semaine, débattant et se formant le samedi, vendant le journal le dimanche. On en est loin...
✔︎ Les groupes d'extrême-gauche agissent. Comme le dit un de leur slogan, "N'attendons pas qu'il se passe quelque chose pour agir mais agissons pour qu'il se passe quelque chose" Ils diffusent des idées par tracts, affiches, peinture, par la diffusion d'une floraison de petits journaux qu'ils autofinancent travaillent sur le net manifestent pour des causes actuelles, provoquent, interpellent font des communiqués, pétitionnent, sont présents là ou on ne les attend pas... Que savons-nous encore faire à part des commémorations ?
✔︎ Les gauchistes donnent des ordres et des consignes à leurs militants. Une organisation politique n'est pas un club de vacances où on va se détendre et s'amuser. Militer, c'est faire la guerre ! Une guerre adaptée au terrain et à la sociologie moderne, et ou il n'existe plus de chemins de repli. L'effort doit être constant jusqu'à la victoire finale et même au-delà, pour ne pas voir sa révolution trahie ou pervertie, récupérée par les révolutionnaires de la dernière heure.
✔︎ Hormis leurs partis qui touchent désormais des subventions publiques (et encore !), les organisations d'extrême-gauche s'autofinancent Les cotisations sont beaucoup plus élevées et proviennent bien souvent d'un prélèvement sur le salaire (de 1% à parfois 10% mensuel !). Plus on gagne, plus on paye : c'est ça l'impôt révolutionnaire moderne. En période économique et sociale difficile, c'est la preuve d'une foi politique vivace, offensive et conquérante. Tout le reste, c'est du blabla...
✔︎ Un effort tout particulier est mis sur la formation politique et idéologique de chaque membre. Car on ne naît pas militant ni officier politique. La foi s'acquiert et s'entretient. L'autoformation est absolument nécessaire par la lecture de livres, revues, journaux de notre mouvance ainsi que ceux de l'ennemi. À Lutte ouvrière, on Impose à chaque nouvel adhérent une liste de livres obligatoires. Puis on débriefe pour s'assurer que la doctrine est assimilée. Mais des formations en interne sont fréquentes, permanentes, actualisées, réactualisées... Comme au sein d'une grande entreprise. On recherche le fanatisme salutaire et la performance.
✔︎ Enfin, par tous leurs réseaux, groupes, associations, journaux, sites, points de vente... ils ont réussi à créer une contre-culture, une contre-société, une famille d'accueil pour les gens qu'ils ont pris en mains et où l'animation interne est permanente afin de ne laisser personne isolé.
Comme on le voit si les gauchistes (tous corps confondus) font tant parler d'eux aujourd'hui et ont réussi à phagocyter des pans entiers de la société (politique, syndicats, média, presse, éducation...), ce n'est pas parce qu'ils sont gauchistes, c'est parce qu'ils y croient qu'ils sont actifs et qu'ils font des efforts ! Sommes-nous plus cons qu'eux ? À nous de répondre...
A force de travailler sérieusement, ces gens qui hier militaient dans l'ombre des groupuscules, sont désormais au pouvoir, aussi bien dans la sphère politique, culturelle que médiatique. Chez les identitaires, on est loin car on confond toujours, pour notre drame, agitation et révolution... serait peut-être temps de grandir...
Eugène Krampon et François Sologne Réfléchir&Agir n°30 Automne 2008
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire