Analyse d’Antoine Pasquier (journaliste à Famille chrétienne) sur l’amendement au projet de loi bioéthique, élargissant le recours à l’IMG :
L’amendement sur l’IMG pour détresse psychosociale, adopté dans le cadre de la loi de bioéthique, ne vient pas de nulle part. Son idée court depuis plusieurs semaines, et son objectif est bel et bien d’ouvrir une brèche pour obtenir un élargissement du délai légal de l’IVG. Explications.
1. Mars dernier. En raison du confinement, le Planning familial s’inquiète du grand nombre d’avortements ne pouvant être pratiqués en France. Il a demandé au gouvernement la possibilité d’allonger le délai légal de deux semaines. Ce dernier s’y oppose, ne voulant pas ouvrir un débat brûlant en pleine crise sanitaire.
2. Toutefois, le 23 avril, en réponse à un courrier adressé par plusieurs parlementaires, le ministre de la santé Olivier Véran annonce dans une lettre qu’en cas de recours tardif à l’avortement, il serait désormais possible d’utiliser la notion de “détresse psychosociale” de l’interruption médicale de grossesse (IMG) pour avoir recours à une IVG par aspiration.
3. Cette possibilité est confirmée par la sénatrice Laurence Rossignol, l’une des parlementaires destinataires du courrier, en séance publique le 4 mai 2020 au Palais du Luxembourg.
4. Cela ne suffit pas. Pour permettre de faciliter le recours à des IVG hors-délais pendant l’état d’urgence sanitaire, Laurence Rossignol dépose le 4 mai un amendement visant notamment à alléger la procédure de l’IMG psychosociale.
5. L’amendement ayant été jugé irrecevable, il est demandé aux collègues de l’Assemblée nationale de prendre le relais.
6. Le 6 mai, le Planning familial écrit à Olivier Véran pour lui demander une nouvelle fois d’élargir les délais d’accès à l’IVG et de simplifier la procédure de recours à l’IMG, alternative à l’IVG dans certains cas. La crise sanitaire est toujours le prétexte, mais il ne s’agit plus ici de mesures temporaires comme cela était le cas de l’amendement de Laurence Rossignol.
7. Le gouvernement continuant de refuser l’allongement du délai d’IVG, la Délégation aux droits des femmes organise le 28 mai une table ronde relative aux « droits sexuels et reproductifs » en période d’état d’urgence sanitaire, organisée dans le cadre des travaux de la mission d’information sur l’accès à l’IVG. Objectif : obtenir cet allongement du délai par tous les moyens.
8. Lors de cette table-ronde, le Dr Gadha Hatem-Gantzer, médecin-chef à la Maison des Femmes déclare (1’51’’54) :
« je crois qu’il y a un vote ce soir au Sénat sur l’allongement et peut-être un peu sur l’IMG. Ça nous aiderait bcp que déjà, autour du covid, les choses soient facilitées. Ça nous laissera le temps ensuite de faire un groupe de travail plus technique sur comment faire mieux. Déjà avoir cette petite souplesse, ça nous réconforterait beaucoup sur le terrain, on se dirait : « allez, on peut y aller, on a le droit »
9. Message entendue par Marie-Noël Battistel, vice-présidente de la Délégation aux droits des femmes présente à cette table-ronde. Depuis plusieurs semaines d’ailleurs, la députée de l’Isère milite pour l’allongement du délai d’IVG.
10. C’est elle qui signera le 3 juillet cet amendement si décrié et discuté depuis.
11. Et si cela ne suffisait pas, Marie-Pierre Rixain, présidente de la Délégation aux droits des femmes, prend le pas de sa vice-présidente en rédigeant un amendement similaire, lui aussi adopté.
12. Affirmer que cet amendement a pour but de « clarifier le droit », comme l’affirme Libé, est un argument fallacieux, qui cache une intention moins louable : jouer du coude pour forcer le gouvernement à allonger le délai légal. Faute d’assouplir les règles de l’IVG, on édulcore celles de l’IMG.
13. Les militants de l’avortement ne font jamais voté un texte sur l’IVG par pur formalisme. Il y a toujours un objectif derrière : faire tomber les barrières les unes après les autres.
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