vendredi 27 novembre 2020

Bien sûr qu’il faut désobéir aux lois iniques !

  


Depuis hier, et l’annonce par l’inénarrable Jean Castex du maintien de la règle absurde de 30 personnes par messe, nous assistons à des prises de position courageuses d’évêques déclarant qu’ils refuseront d’obéir et d’expulser le 31e fidèle. Disons-le tout net: je m’en réjouis vivement. A beaucoup de points de vue. D’abord parce que nous avons besoin de prophètes dans un monde post-moderne (et post-humain) qui crève de soif spirituelle. Mais aussi parce qu’Emmanuel Macron est en train d’achever le travail de son glorieux prédécesseur en unifiant les forces vives du catholicisme français (disons, pour faire simple, les traditionalistes et les charismatiques) qui avaient déjà manifesté côte à côte contre la loi Taubira et qui, désormais, luttent ensemble pour leur liberté religieuse.


Mais, depuis hier, j’entends aussi une intéressante question, comme un doute lancinant: et si le gouvernement nous tendait un piège?

De fait, la règle est absolument incompréhensible. Tout le monde l’a dit et redit, même les médias aux ordres: il est inepte d’édicter la même règle de 30 personnes pour une chapelle microscopique et pour une cathédrale. La logique aurait voulu que l’on dise tant de personnes par mètre carré ou telle distance entre deux fidèles. Comme nous ne parvenons à nous résigner à l’idée que nous sommes gouvernés par des dingues, nous cherchons une logique. Et l’une des plus solides qui apparaît en quelques secondes de réflexion est, en gros, la suivante: le gouvernement édicte (après y avoir réfléchi et avoir “consulté” les évêques, ne l’oublions pas!) une règle idiote pour que les catholiques y désobéissent. Quel intérêt me direz-vous? Tout simplement celui-ci: à la veille de la discussion sur le prétendu “séparatisme islamique”, pouvoir dire que “les plus radicaux des catholiques”, comme les plus radicaux des musulmans, font passer leur loi religieuse au-dessus de la loi de la république – et sont donc tout aussi “séparatistes” et doivent être traités tout aussi sévèrement. Ce qui veut dire supprimer la liberté d’association ou la liberté scolaire pour nous aussi.
J’ignore bien sûr si ce projet de guerre civile est bien celui de ceux qui prétendent nous gouverner. Mais, si c’était le cas, cela appellerait plusieurs réponses.
Tout d’abord, le B A-BA de la civilisation, non seulement depuis le Christ mais depuis Antigone, est précisément la reconnaissance d’une loi supérieure à la loi positive – d’une loi à l’aune de laquelle juger la loi positive. C’est une régression inouïe que nous ont imposée les révolutionnaires de 1789 (et, après eux, les totalitaires de tout poil) d’affirmer que la loi était “l’expression de la volonté générale” – c’est-à-dire qu’une majorité parlementaire se prétend dotée du pouvoir, non seulement d’édicter la loi positive en référence à la loi naturelle (loi supérieure inscrite dans le coeur de tout homme, malgré les obscurcissements de notre intelligence et l’affaiblissement de notre volonté dus au péché), mais de créer littéralement le droit, c’est-à-dire de dire le bien et le mal ou le bien et le vrai. Selon cette idéologie monstrueuse, le parlement français a imposé une vérité historique par d’innombrables lois mémorielles et il est parvenu à transformer des crimes en droit ou inversement (ne songeons qu’à l’avortement: crime en 1970, droit en 2020). Au fond de cette logique effrayante figure toujours cette immortelle déclaration du sénateur socialiste Jean-Pierre Michel : « Ce qui est juste, c’est ce que dit la loi. Voilà, c’est tout. Et la loi ne se réfère pas à un ordre naturel. Elle se réfère à un rapport de forces à un moment donné. Et point final. » Ou, pour le dire comme Jacques Chirac : « Non à une loi morale qui primerait sur la loi civile. » J’avoue n’avoir jamais compris comment, avec ces principes, ces braves gens pouvaient dénoncer les horreurs nationales-socialistes : que je sache, les lois raciales du IIIe Reich ont été votées dans les formes par un parlement légalement élu. Elles étaient donc bel et bien l’expression « d’un rapport de forces à un moment donné ». Nous, catholiques, nous, êtres humains civilisés, avons une raisons très solide de nous y opposer : elles violaient la loi naturelle. Mais M. Michel ou M. Chirac ?
En tout cas, que la loi s’impose par cela seul qu’elle est la loi est bel et bien un dogme du totalitarisme contemporain. Mais il nous est strictement impossible d’y adhérer. Encore une fois, il ne s’agit pas de loi religieuse, mais de loi naturelle et de respect de la conscience, ce qui distingue l’homme de l’animal.
Deuxième élément de réponse, plus historique : la Révolution, dont M. Macron et les siens se veulent les héritiers (le candidat Macron avait même intitulé son livre de campagne « Révolution » et y manifestait clairement de puissantes pulsions totalitaires), est un régime de guerre civile et plus particulièrement de guerre civile contre l’Eglise catholique – qui a fait la France (ce que, bien sûr, ne peuvent supporter les tenants du « contrat social » qui voudraient faire croire que la France est née d’une décision parlementaire à l’été 1789 !). Ce n’est pas nous qui avons voulu cette guerre civile. Mais la loi naturelle (toujours elle) autorise tout être humain (même souvent lui impose) de défendre sa vie et sa famille.
Troisième remarque, juridique cette fois. Non il n’est pas vrai que l’Etat ait le pouvoir de supprimer la liberté scolaire ou la liberté d’association, comme prétend le faire ce projet de loi. Plus exactement, il a évidemment la force de coercition, mais il n’a pas la légitimité pour le faire. Même pour les islamistes. C’est un droit naturel des parents d’éduquer les enfants (qui découle de leur responsabilité éducative bien sûr). C’est un droit naturel des êtres humains de s’associer entre eux. Est-ce à dire qu’il serait illégitime d’attaquer l’islam radical ? Bien sûr que non. Car l’Etat a la responsabilité de la sécurité et qu’il peut fort bien, pour cela, supprimer les libertés des agresseurs (qu’il s’agisse de criminels ou d’ennemis). Par ailleurs, il a parfaitement le droit (et sans doute même le devoir) d’encourager le rayonnement de la culture française et de décourager le prosélytisme mahométan. Mais il est très différent de supprimer certaines libertés, dans certaines conditions, à certains suppôts de la charia, et de supprimer les libertés de tous. Je sais bien que nous vivons dans l’ère de la non-discrimination, mais ne pas discriminer entre honnêtes gens et assassins est d’une injustice insigne.
Enfin, au plan plus politique, ce piège éventuel, il est impératif que nous y entrions pour le démonter et placer des principes de bon sens au cœur du débat politique. Nous allons peut-être payer notre désobéissance. Franchement, je ne le crois pas. J’ai peine à imaginer les descentes de police dans des églises : comme disait Mgr Ginoux, ce serait un spectacle intéressant ! Mais, si le pire n’est jamais certain, il n’est pas à exclure non plus et, en d’autres temps, la police est bel et bien venue chercher les catholiques dans leurs églises. En toute hypothèse, c’est notre devoir de fidèles catholiques comme de citoyens de nous battre pour la justice – et donc de résister aux lois iniques. Cette action de résistance pacifique à l’injustice nous permet aussi de rectifier de graves erreurs – trop souvent colportées par les médias ou les politiciens. Non, il n’est pas vrai que ce que nous reprochons à l’islam soit de placer la loi religieuse au-dessus de la loi de la république. Ce que nous lui reprochons, c’est de ne pas toujours respecter la loi naturelle. Quand l’islam fait, avec une poésie raffinée, de la femme un « champ de labour » pour l’homme, en faisant un pur objet de plaisir (tout comme la pornographie, soit dit en passant : l’archaïsme islamique n’est pas sans lien paradoxal avec la post-modernité libertaire), il attaque l’humanité de la femme – et, par la même occasion, de l’homme qui vient nécessairement de la femme. Quand l’islam prétend détruire tous les droits du « mécréant », il attaque l’humanité des quatre cinquièmes de l’humanité. C’est cela que nous pouvons légitimement lui reprocher. Nous sommes fondés à dire aux musulmans désireux de s’installer chez nous ou, a fortiori, d’acquérir notre nationalité que, dans notre pays, nous respectons l’humanité de tous les êtres humains et que les points de la charia qui s’opposent à la loi naturelle ne peuvent pas s’appliquer en France. Mais nous ne pouvons évidemment pas promulguer une loi qui reviendrait à mettre Antigone, Socrate ou Jésus-Christ hors la loi !
L’immense apport juridico-politique de la civilisation européenne, fille d’Athènes, Rome et Jérusalem, au monde tient dans cette distinction entre loi positive et loi naturelle, entre légalité et légitimité. Que M. Macron, M. Castex et cette « majorité » qui ne « pèse » pas plus de 10% de l’électorat n’y entendent rien est fort regrettable, mais nous n’y pouvons rien. Pour nous, piège ou pas piège, nous considérons qu’une loi inique n’oblige pas en conscience.
Guillaume de Thieulloy
Directeur du Salon beige

https://www.lesalonbeige.fr/bien-sur-quil-faut-desobeir-aux-lois-iniques/

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