On pensait jusqu'ici que l'homme de Néandertal avait disparu il y a environ 30 000 ans, et que c'est dans le sud de la péninsule ibérique qu'il s'était maintenu le plus longtemps. Après avoir examiné près de 200 restes de Néandertaliens, ainsi que des outils utilisés par eux provenant de 40 sites archéologiques dispersés dans toute l'Europe, depuis le Caucase jusqu'au Portugal, et les avoir soumis à de nouvelles méthodes de datation (des techniques d'ultrafiltration qui purifient le collagène extrait des os pour éviter sa contamination par des particules modernes), Tom Higham, Ron Pinhasi et leurs collègues de l'Université d'Oxford et du Collège universitaire de Dublin estiment maintenant que l'extinction de l'homme de Néandertal a eu lieu plus tôt qu'on ne le croyait, plus précisément entre il y a 41 030 et 39 260 ans.
Les hommes anatomiquement modernes et les Néandertaliens n'auraient donc cohabité que pendant une période de quelques milliers d'années, ce qui leur a quand même laissé largement le temps de se croiser. Les études dont on dispose depuis les recherches pionnières publiées en 2010 par Svante Pääbo, notamment les travaux réalisés récemment sous la direction de Konrad Lohse, de l'Université d'Edinburgh, et Laurent Frantz, de l'Université de Wageningen (Pays-Bas), montrent en effet que l’Homo sapiens actuel possède de 1,5 % à 4 % d'ADN de Néandertaliens dans ses gènes, mais aussi que seuls sont concernés les Européens et les Asiatiques, les Africains n'ayant hérité d'aucun gène néandertalien (ce qui prouve que le croisement entre hommes modernes et Néandertaliens est postérieur à leur arrivée en Europe, et que leur parenté génétique ne s'explique pas par le fait qu'ils descendent les uns et les autres des mêmes sous-populations ancestrales d'origine africaine). Benjamin Vernot et Joshua M. Akey, généticiens de l'Université de Washington, estiment pour leur part à 20 % la proportion du génome de Néandertal toujours présent dans l'ADN de nos contemporains, chiffre qui n'est pas incompatible avec l'évaluation précédente, car les « parties communes » d'ADN avec les Néandertaliens ne sont pas les mêmes chez tous les individus. Certains allèles de l'homme de Néandertal, comme ceux qui sont impliqués dans la formation de la kératine, en partie responsable de la pigmentation de la peau, pourraient avoir aidé l'homme moderne a mieux maîtriser son environnement européen. D'autres semblent impliqués dans des pathologies telles que la cirrhose biliaire, la maladie de Crohn, le lupus et le diabète de type 2. L'hérédité néandertalienne est en revanche totalement absente du chromosexuel masculin, où elle aurait été éliminée par sélection naturelle, ce qui suggère que les croisements sexuels avec l'homme de Néandertal avaient pour effet de réduire la fécondité.
Sources Nature, 29 janvier 2014 Journal of Human Evolution, 14 avril 2014 Genetics, avril 2014 Nature, 20 août 2014.
via éléments n°156
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