En date du 20 mai, censurant la loi de sécurité globale, c'est une vraie victoire que vient d'accorder le conseil constitutionnel aux rengaines de la gauche et aux campagnes de l'extrême gauche. La décision du petit aréopage présidé par Fabius a été prise au nom de vagues principes et au gré de quelques sophismes. Or, elle ne constitue pas seulement un camouflet pour les manifestants rassemblés la veille 19 mai devant l'Assemblée nationale, en solidarité avec les forces de l'ordre. Elle censure en même temps la présence de tous les partis non-communistes, à la seule exception de la soi-disant "France Insoumise". Elle contredit enfin une préoccupation bien réelle de l'opinion.
À cet égard, quoiqu'entachée d'une évidente hypocrisie politicienne, la participation controversée du ministre de l'Intérieur signifiait bien à ce sujet que le gouvernement a pris conscience du désir de sécurité de l'opinion publique, très majoritairement favorable aux policiers plutôt qu'aux voyous, et qu'il espère ne pas être désavoué sur ce terrain par les électeurs.
Rappelons au besoin que même une Hidalgo a suffisamment compris la demande de sécurité des habitants de l'Ile-de-France, à la veille des élections régionales de juin, qu'elle fait part de son désir, étrangement enfoui depuis son élection à la mairie de Paris en 2014, de créer une police municipale dans ce qui est en train de devenir la capitale de la chienlit. Étrange retournement n'est-il pas vrai ?
On soulignera ainsi que le texte de la loi votée par les deux chambres, c'est-à-dire à la fois par la majorité gouvernementale de l'Assemblée Nationale et par celle d'un Sénat dominé par l'opposition, était débattu depuis novembre. Diverses rectifications lui avaient été opportunément apportées. Au bout de 6 mois de travail, un consensus s'était dégagé. Il ne laissait, comme critiques irréductibles, que les éditoriaux des anciens trotskistes de Mediapart et les ex maoïstes de Libé.
Les principales victimes seront les quelque 560 000 familles de policiers, de gendarmes, de salariés des polices municipales ou des sociétés de sécurité, que l'ancien article 24 devenu article 52 entendait protéger. On souhaitai à juste titre les prémunir contre le "racisme anti flic" impunément développé à l'encontre de ces indispensables fonctionnaires, de leurs épouses et de leurs enfants, livrés la violence des racailles dans les quartiers populaires où ils habitent. Les prétendus "Sages" qui siègent au Palais Royal se sont assis sur l'un des plus importants droits de l'Homme énumérés par la fameuse déclaration de 1789 : "le droit à la sûreté". Leur irritant surnom de "Sages" (inventé par qui ?) se révèle à contre-emploi.
Dans une tribune publiée par Figarovox le 21 mai, un ancien secrétaire général du Conseil Constitutionnel a longuement développé la plupart des critiques qu'appelle cette incroyable jurisprudence. Jean-Eric Schoettl sait de quoi il parle, ayant été de 1997 à 2007 la cheville ouvrière de l'institution. Il est vrai qu'il n'appartient pas au camp du bien et s'est honoré, depuis la fin de ses fonctions, de quelques rappels au bon sens. Pour s'en persuader, on lira par exemple sa tribune intitulée : « La machine à éliminer Fillon rappelle les procès staliniens. »[1]
Ne nous y trompons pas cependant. Présidés par un Jean-Louis Debré, flanqué encore de Giscard et Chirac, ces “juges” se montraient déjà ineptes et malfaisants. Ajoutons que, grassement rémunérés pour un service finalement assuré, en amont, au plan du travail juridique, par d'honorables fonctionnaires fort compétents, ils ne semblent pas eux-mêmes vraiment indiscutables, même sur le terrain du désintéressement. Les uns servent l'État, d'autres se servent de l'État...
Le scandale dure depuis un demi-siècle. On doit retenir en effet qu'en 1971, au gré d'un avis qui lui avait été malencontreusement demandé, cette juridiction s'est emparée d'un pouvoir à la fois imprévu et incongru.
En cette occasion elle a progressivement érigé en doctrine la théorie du bloc de constitutionnalité : un texte de loi peut désormais être censuré par elle au nom du préambule de 1946. Élaboré à l'époque par les socialistes associés aux communistes, ce texte lui-même est vaguement rappelé par la constitution de 1958... d'autres références, telles que la devise de la république "liberté, égalité, fraternité" vont à ce titre permettre d'exonérer de sanctions pénales l'aide aux migrants illégaux, au nom du "principe de fraternité"... de même, sur les lois qui peuvent encore choquer les barbus du laïcisme, il est constamment rappelé, à l'encontre des catholiques, le caractère "laïc" de l'État, sans jamais rappeler que la loi de 1905, fondatrice de cette "laïcité" n'emploie jamais le mot et se présente comme instituant la liberté religieuse, etc.
On le voit, la révolution constitutionnaliste anti-démocratique vient en fait de loin et va encore plus loin...
Le fondateur de la Cinquième république, dont tous se gargarisent avait sur ce point une formule heureuse : "en France, la cour suprême c'est le peuple".
Espérons qu'il pourra trancher bientôt puisque par deux fois, aux régionales et départementales de juin, puis à la présidentielles et aux législatives de 2022, on lui en laisse, pour peu de temps encore, le loisir.
JG Malliarakis
Apostilles
[1] Le texte de cette tribune a été publié dans Le Monde en date du 2 mars 2017.
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