Mercredi, à l’Assemblée, Élisabeth Borne prononçait son discours de politique générale : le chef du gouvernement veut commencer à réduire la dette en 2026 et revenir à un déficit public sous la barre des 3 % du PIB, c’est-à-dire dans les conditions imposées par Bruxelles, en 2027. Élisabeth Borne s’est cependant bien gardée d’évoquer une cure d’austérité. Comme le commente Guillaume Tabard dans Le Figaro (7/7/2022), « sous l’appel à la rigueur budgétaire, la liste des dépenses nouvelles est abondante et celle des économies, vierge ».
Pourtant, la liste des dépenses publiques liées à l’immigration est bien longue, sur-étoffée par une mauvaise gestion des comptes en la matière.
Un exemple ? Les dépenses liées à la santé des étrangers en France, irréguliers ou non.
Nous avons ici plusieurs fois évoqué l’AME et son coût d’un milliard d’euros à la collectivité, chaque année. Voudrait-on revenir dessus qu’il faudrait passer outre les contraintes d’engagements européens… et faire montre de courage politique. Comme le souligne un rapport de l’inspection des finances de 2019, « l’AME s’inscrit dans un cadre juridique constitué des engagements internationaux de la France, diversement contraignants, du droit européen et de plusieurs décisions du Conseil constitutionnel et du Conseil d’État. Ce cadre définit un socle minimum de soins aux étrangers en situation irrégulière, notamment pour les situations d’urgence et pour les populations les plus vulnérables (mineurs et femmes enceintes). » Ce même rapport reconnaissant volontiers que « le dispositif français apparaît singulier tant par sa logique d’ouverture de droits que par la définition d’un panier de soins proches de ceux du droit commun ; ces singularités, qui découlent des spécificités du système de soins français […] le désignent comme l’un des plus généreux de l’Union européenne. »
Mais il n’y a pas que l’AME. La France, dans sa générosité, ou plus exactement celle des Français assujettis à l’impôt, a mis en place une procédure spéciale d’admissions aux titres de séjour pour soins médicaux.
Selon un rapport de l’OFII (Office français d’immigration et d’intégration) à destination du Parlement et publié fin 2021, ce dispositif - encore une exception française - « permet chaque année depuis sa création à des dizaines de milliers de personnes étrangères éligibles de se faire soigner, même dans des secteurs en tension ». Ces personnes sont « prises en charge à travers des cotisations versées par les partenaires sociaux ou par l’impôt, et ce quel qu’en soit le coût », précise le rapport. Selon ce même rapport, « 77 % des avis favorables transmis au préfet indiquent une durée prévisible de soins supérieure ou égale à 12 mois » (cité par Le Figaro).
Dérives
À l’origine, ce dispositif s’appliquait aux personnes résidant déjà en France : il a été très rapidement dévoyé. Les cinq premiers pays bénéficiaires sont l’Algérie, le Congo, le Cameroun, la Géorgie et le Mali, mais ce sont en tout des ressortissants de 127 pays qui en bénéficient. À l’origine encore, seuls pouvaient être soignés les malades pour qui l’absence de soin serait « d’une exceptionnelle gravité » ou ceux n’ayant aucune possibilité de se soigner dans leur pays d’origine. Dans les faits, il y a une extension indéfinie de ce dispositif à des étrangers qui ne vivent pas vraiment dans des déserts médicaux. Sinon, comment expliquer que l’on compte parmi les bénéficiaires du dispositif des Japonais, des Émiratis, des Saoudiens, des Canadiens, des Américains… qui n’ont jamais cotisé en France ? Selon un médecin de l’OFII cité par Le Figaro, « au fil du temps, la pression des candidats fraîchement arrivés de l’étranger s’est faite de plus en plus forte. Elle a épousé les immenses besoins de santé de ces populations. » À ce dévoiement s’ajoutent de nombreuses fraudes : la demande de séjour au titre de l’accès au soins est parfois l’occasion pour un débouté du droit d’asile de reformuler une demande.
Et que dire du flou artistique qui entoure l’épineuse question du coût de ce dispositif ? Le permis de séjour pour soins est généralement accordé pour six mois renouvelables : plus de 60 % des demandes sont des renouvellements. Car ce sont des soins lourds et longs qui sont dispensés gratuitement, et donc aux frais de la collectivité nationale, à ces étrangers : selon l’OFII, cité par Radio Classique, « entre 2017 et 2020, 30.000 personnes ont demandé à la France la prise en charge de soins psychiatriques, 17.000 ont demandé un traitement pour le VIH, un peu moins pour le diabète, 14.000 pour soigner un cancer, 4.400 pour se faire dialyser et, enfin, 2.200 pour une greffe d’organe ».
Une proposition de loi du 8 février 2022, cosignée notamment par Éric Ciotti, demandait la remise en ordre des comptes publics sur ce dispositif. En effet, lorsqu’une demande est acceptée, ni devis préalable ni plafond budgétaire, ni évaluation des « frais de vie « assumés par l’État, ni limitation dans le temps du parcours de soins ne sont établis.
Une remise en ordre drastique des comptes publics par le gouvernement passe, évidemment, par un renversement complet de notre politique d’immigration.
Les Français l’ont-ils seulement compris ?
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