Le gouvernement, plus exactement le chef de l'État, a choisi une voie, qu'il imagine imparable, pour répondre à la motion de rejet votée par l'Assemblée nationale. On s'achemine donc vers la procédure, parfaitement constitutionnelle, de la réunion d'une commission mixte paritaire de 14 membres. Elle sera composée de 14 membres, soit 7 sénateurs et 7 députés. On annonce par exemple la participation de Bruno Retailleau, défenseur du projet sénatorial, au total 4 macroniens, 1 modem, 1 sénateur union centriste, 4 LR, 2 socialistes 1 RN, 1 LFI. À suivre évidemment.
Il se trouve, qu'en marge et indépendamment de cette commission, la droite développe sa campagne d'opinion en faveur d'un référendum. Celui-ci serait supposé trancher sur la question de l'immigration. Ceci pourrait surprendre en pure logique, dans la mesure où ce problème, lancinant depuis plus de 40 ans et qui a déjà donné lieu à quelque 30 lois et règlements, très inégalement appliqués ne saurait se résoudre par une simple question à laquelle les citoyens seraient appelés à répondre par oui ou par non.
Plus précisément, toutes les études d'opinion ont déjà répondu : quand on pose aux habitants actuels de la France métropolitaine s'ils veulent encore plus d'immigrés sur notre sol, ils répondent à plus de 80 % : stop.
Tout le monde le sait, sauf peut-être les personnes résidant dans les palais nationaux et certains représentants du gros argent. Ajoutons que sur les 19 % de Français répondant qu'ils souhaitent généreusement, avec l'argent des autres en général, accueillir plus de migrants, certains mauvais esprits pourraient même se demander si la moitié de ces 19 sur 100, habitants de notre pays interrogés par les sondeurs, se définissent eux-mêmes réellement comme français.
Or, la question du référendum ne porte pas sur cette question dont chacun connaît la réponse.
Au bout du compte, il s'agira de rompre ou non avec la CEDH.
Voilà un sigle qui semble mystérieux à trop d'interlocuteurs, alors qu'il est décisif. Il renvoie à 3 significations distinctes.
La première est celle de la Convention européenne des droits de l'Homme. Ce document représente aujourd'hui, dans sa version consolidée, la bagatelle de 62 pages, au format pdf. Il comprenait à la base 59 articles, signés à Rome le 4 novembre 1950. Ce texte a été suivi en 1952 par un premier protocole additionnel de 6 articles. Ils ont été complétés par un protocole "numéro 4" convenu à Strasbourg en 1963, sous le titre de "Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales reconnaissant certains droits et libertés autres que ceux figurant déjà dans la Convention et dans le premier Protocole additionnel à la Convention" (ouf), dans lequel se trouvent affirmées, pêle-mêle : l'Interdiction de l’emprisonnement pour dette, la Liberté de circulation, l'Interdiction de l’expulsion des nationaux. En 1983 fut décrétée l'abolition de la peine de mort, interdiction consolidée en 2002. En 1984, sont apparus divers additifs dont des Garanties procédurales en cas d’expulsion d’étrangers, puis d'autres dispositions, certaines très lourdes de conséquences théoriques comme le principe de non-discrimination, ceci jusqu'en 2013.
Faut-il considérer que cet amoncellement d'excellentes intentions originelles, telles que le droit à la vie familiale, et quelques libertés fondamentales, bien claires, sont de simples chiffons de papier, pour reprendre l'expression de Michel Debré quand il dénonçait les traités européens avant 1958 ? Faut-il l'envoyer directement, en bloc, dans les poubelles jaunes du tri sélectif ? La réponse est non : au départ, en 1948, il y a donc 75 ans de cela, Winston Churchill, leur inspirateur, pensait qu'il fallait convenir d'un certain nombre de libertés concrètes communes aux Européens alors menacés par l'extension du bloc soviéto-stalinien.
On n'employait pas trop le mot ronflant de "valeurs".
La simple énumération des protocoles additionnels nous montre d'ailleurs, en revanche, que ce document devrait être révisable, puisqu'il a été révisé, plusieurs fois, entre 1950, sa signature, 1953 son entrée en vigueur et 2013, passant de 34 à 62 pages.
Cessons de parler de cette convention comme si elle avait été donnée par Dieu à Moïse sur le mont Sinaï.
Or, le gouvernement des juges tel qu'il fonctionne en France, aussi bien notre Conseil constitutionnel que notre Conseil d'État, dont on ne s'attardera pas à rappeler ici de quelle sorte de "Sages" sont composées ces instances, prétend nous menacer des foudres de la CEDH, autre signification du sigle : Cour Européenne des Droits de l'Hommes. Cette CEDH-juridiction, ce Machin, comme "Cour européenne des droits de l'Homme – pour parler comme De Gaulle – sert en effet d'arbitrage entre pays signataires de la CEDH-convention.
Il se trouve que l'article 58 de cette convention dispose qu'on ne peut en sortir sauf : ou bien à la dénoncer avec un délai de 5 ans ; ou bien tout simplement sortir du Conseil de l'Europe...
Troisième signification, autre Machin.
Le Conseil de l'Europe est confondu dans l'esprit de trop de nos compatriotes avec l'Union européenne des 27 États, que nous connaissons mieux.
Ce Machin-là c'est une petite ONU de 46 membres, encore moins efficiente que les Nations-Unies. Elle associe des États effectivement européens à des pays comme la Turquie d'Erdogan ou l'Azerbaïdjan.
Quitter le Conseil de l'Europe ? Si c'est la question qui se pose juridiquement aujourd'hui pour redresser la France, chasser les indésirables et construire demain une véritable Europe, la réponse est oui.
JG Malliarakis
https://www.insolent.fr/2023/12/la-cedh-sur-la-sellette.html
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