samedi 13 avril 2024

Europe et immigration : le royaume enchanté de Raphaël Glucksmann

 

Glucksmann capture ecran

Ce 12 avril, Raphaël Glucksmann et Jordan Bardella débattaient sur France Inter. Certes, la puissance invitante n’est pas d’une neutralité exemplaire. Mais si le service public était au service du public, cela se saurait depuis longtemps.

Il en faut évidemment plus pour désarçonner le président du Rassemblement national. Ce, d’autant plus que la tête de liste de Place publique n’est pas ce qui se fait de pire à gauche. Comme on dit, dans les derniers bistrots de nos campagnes : « Ce n’est pas le mauvais gars, même si on voit bien qu’il n’a pas inventé le bidon de deux litres… »

Il est vrai qu’il faut au moins porter ceci à son crédit : Raphaël Glucksmann est un homme bien élevé, même avec Jordan Bardella. Au contraire de ses homologues de La France insoumise, il est capable de sourire, de ne pas éructer et même de déclarer son amour de la France : « Comme des millions de Français, je suis amoureux de l’histoire de notre pays et il a quelque chose à dire au monde. C’est parce que la France reste souveraine, je veux la sécurité des Français, qu’ils reprennent en main leur destin. Je ne me résoudrai jamais que la France devienne un terrain de jeu pour multinationales américaines, pour des émirs qataris ou des oligarques russes. C’est pour que la France reste la France que je veux construire cette puissance européenne. »

Toujours plus d’Europe et moins de France

Pour lui, il faut donc de plus en plus d’Europe, alors que cette dernière va de plus en plus mal, et la France au passage. Voilà qui rappelle la grande époque de l’URSS durant laquelle, si l’échec du communisme était manifestement patent, c’était justement parce qu’il n’y avait encore pas assez de communisme. Bref, Raphaël Glucksmann évoque plus ce que l’Europe pourrait être demain au lieu de se résoudre à voir ce qu’elle est aujourd’hui devenue.

Sans surprise, à l’idéal européen, Jordan Bardella préfère la réalité de tous les jours, même si autrement moins lyrique : « Je me soucie du quotidien des Français. J’aime éperdument mon pays, mais j’estime que les intérêts de la France ne sont plus suffisamment défendus sur la scène européenne. » Un exemple concret qui parlera à tout le monde: « Les Français voient leurs factures d’électricité et d’énergie augmenter depuis maintenant deux ans. Ces hausses intempestives pour les familles et entreprises sont liées à des règles de fixation des prix au niveau européen qui font que la France ne peut plus bénéficier des fruits de sa production nucléaire. En réalité, les prix de l’énergie en France sont alignés sur le prix des centrales à gaz ou à charbon allemandes. »

 

Le fossé entre les deux têtes de liste aux prochaines élections européennes s’agrandit encore lorsque la question migratoire arrive sur le tapis. Pour l’homme de Place publique, « l’immigration zéro » signerait « la mort des économies européennes » et de « nos sociétés ». Le fait que personne, même pas Éric Zemmour et Marion Maréchal, n’évoque une « immigration zéro » ne semble un seul instant lui effleurer l’esprit. Et le même de poursuivre, tout guilleret, affirmant avoir « confiance dans les capacités intégratrices de la France ». Bizarrement, voilà qui ne saute pas aux yeux, ne serait-ce qu’à la lecture des faits divers. Peu lui importe, finalement, puisqu’il n’hésite pas à affirmer : « Il n’y a pas trop d’immigration en France. »

La gauche des beaux quartiers

Si l’on résume, l’Europe devrait, à l’en croire, résoudre les problèmes de la France et l’immigration ceux de l’économie française. D’où la question qui tue, posée par Jordan Bardella : « Mais vous vivez dans quel quartier, pour dire ça ? » Il est vrai que lui, petit-fils d’immigrés, a grandi dans les cités de Seine-Saint-Denis, loin d’un autre quartier - Saint-Germain-des-Prés, pour ne pas le nommer - où le fils du philosophe vaguement maoïste André Glucksmann a usé ses fonds de culottes. Autrefois, la gauche défendait les ouvriers ; désormais, elle en pince pour le royaume enchanté de Mickey, repeint aux couleurs de l’arc-en-ciel, inclusif et bienveillant.

C’est peut-être là que le match, pourtant ferme mais courtois, bascule, le président du RN ayant beau jeu de lui rétorquer que « 70 % de l’électorat socialiste » est d’un avis contraire. Mais peut-être que Raphaël Glucksmann préfère mener campagne pour les 30 % restant. Ou de l’art de faire ce qu’on peut avec les restes de ce que l’on a…

Entre une France fantasmée et la France telle qu’elle est, les électeurs n’auront bientôt plus qu’à trancher.

Nicolas Gauthier

https://www.bvoltaire.fr/europe-et-immigration-le-royaume-enchante-de-raphael-glucksmann/

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