Prenons quelques exemples illustratifs. Le 13 novembre, CNews a été condamnée à 100.000 euros d'amende au motif que dans l’émission En quête d’esprit, Aymeric Pourbaix a présenté l’avortement comme la première cause de décès dans le monde, devant le cancer et le tabac. Que dit l’Arcom ? « Une partie de la séquence en cause assimile l’avortement à une cause de mortalité et, par voie de conséquence, l’embryon ou le fœtus qui n’a pu naître vivant en raison d’un avortement à une personne décédée alors même qu’en droit, ils ne sont pas considérés comme des personnes. L’avortement ne saurait donc être présenté comme une cause de mortalité » (point 8 de la décision).
Plusieurs remarques peuvent être faites. En premier lieu, il semblerait hasardeux de présenter l’avortement comme un acte de vie. Au demeurant, l’Arcom le reconnaît, puisqu’elle relève que « l’embryon ou le fœtus… n’a pu naître vivant en raison d’un avortement ». L’avortement est donc bien l’interruption d’un processus vital. En second lieu, les censeurs de l’Arcom ont bien été, à un moment de leur existence, cet embryon et ce fœtus auquel le droit français dénie la qualité de personne. Qu’étaient-ils donc, alors ? Rien ? Non, ils étaient des personnes en devenir et qu’ils sont devenus. Au demeurant, la loi du 17 janvier 1975, dite loi Veil, stipulait, dans son article 1 : « La loi garantit le respect de tout être humain dès le commencement de la vie. Il ne saurait être porté atteinte à ce principe qu’en cas de nécessité et selon les conditions définies par la présente loi. » Que cet article ait été abrogé par une ordonnance du 22 juin 2000 et que ce qui était une exception à un droit essentiel, le droit de tout être humain à la vie, soit devenu un droit constitutionnel n’est que le signe d’une perte de sens de la part des politiciens français. Il en résulte que l’Arcom a voulu censurer une opinion, que l’on peut contester, à savoir que l’embryon ou le fœtus est une personne, mais nul ne peut contester que l’avortement constitue bien l’arrêt d’un processus vital qui aurait conduit à la naissance d’un être humain. C’est donc bien une atteinte à la liberté d’expression dont il s’agit, voire à la liberté de conscience. Le droit n’a rien à faire en l’espèce. Toute loi votée peut être contestée, c’est le principe même de la démocratie. Y compris la loi constitutionnelle. La meilleure preuve est que depuis 1789, la France a connu 14 Constitutions. Nous sommes donc face à une décision idéologique.
Autre exemple : en juillet 2024, CNews a été sanctionnée au motif qu’un invité de l’émission Punchline d’août 2023 avait mis en doute le fait que le dérèglement climatique soit imputable aux seules activités humaines. Y aurait-il donc une vérité scientifique officielle, comme au temps béni de Trofim Lyssenko ? Dans ce cas, comme dans le précédent, l’Arcom relève qu’il n’y a pas eu « la moindre réaction sur le plateau », ce dont il est possible de déduire que si quelqu’un avait réagi, ne serait-ce que pour la forme, il n’y aurait pas eu de problème ! C’est bien là l’habituel formalisme procédurier de tous les systèmes d’essence totalitaire.
Dernier exemple, mais il pourrait y en avoir d’autres. En mai 2024, CNews a été sanctionnée parce que Geoffroy Lejeune avait affirmé que l’antisémitisme et la surpopulation carcérale étaient des conséquences de « l’immigration arabo-musulmane ». La formulation est peut-être lapidaire, mais qui pourrait honnêtement affirmer qu’il n’y a aucun lien entre l’islam et le nouvel antisémitisme qui se répand sans complexe en France ? Quant au lien entre immigration non contrôlée et délinquance, plus personne ne le nie sérieusement. Ce qui ne signifie pas, bien évidemment, que tous les immigrés « arabo- musulmans » sont antisémites ou délinquants.
Conclusion de tout cela : la guerre d’usure menée par l’Arcom contre le groupe Bolloré n’est que le signe d’une guerre globale du système oligarchique contre toute opinion dissidente par rapport à la doxa officielle individualiste, libertaire et mondialiste. Le rêve de cette nomenklatura, qui se prétend « diversitaire », est celui d’un monde soumis à une idéologie unique et à une expression uniforme. En un mot, un bon vieux totalitarisme fondé sur le harcèlement juridique. N’oublions jamais Camille Desmoulins : « Ce sont les tyrans malhabiles qui usent des baïonnettes. Les tyrans habiles usent du droit. »
Stéphane Buffetaut
https://www.bvoltaire.fr/chronique-la-chasse-au-groupe-bollore-est-ouverte-toute-lannee/
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