
Marchal et sa période Netflix
Depuis 2020, hélas, Olivier Marchal a cédé au chant des sirènes et a réalisé pour Netflix ces films suivants : Bronx et Overdose. Deux longs-métrages brouillons, aux récits téléphonés, qui traduisaient un tiraillement du réalisateur entre le cinéma et la fiction télé. Marchal y caricaturait son style, remisait pour de bon le lyrisme de ses premiers longs-métrages, et se perdait dans une violence gratuite et numérique portée par des personnages à peine esquissés, sur fond de musique rap.
Si bien que, lorsqu’une suite à 36 quai des Orfèvres fut annoncée dans les médias, nous étions naturellement inquiet, mais voulions croire, cependant, que le réalisateur se remettrait sur les bons rails.
Contrairement à ce qui fut prévu initialement, Bastion 36 n’est pas lié au film de 2004, ni par l’intrigue ni par les personnages. Le récit suit Antoine Cerda (Victor Belmondo), un capitaine de police membre de la BRI, qui s’est fait gauler par l’IGPN pour avoir participé à des combats clandestins contre des racailles de cité. Muté d’office à la BAC, en Seine-Saint-Denis, le jeune officier apprend un an plus tard qu’un membre de son ancienne équipe de la BRI a été abattu de sang-froid et que deux autres ont disparu mystérieusement. Quand l’un d’entre eux est retrouvé mort à son tour, Cerda décide de mener l’enquête et comprend très vite que ses collègues ont franchi la ligne jaune…
Un retour aux fondamentaux
Adapté du roman Flics Requiem, de Michel Tourscher, Grand Prix VSD du polar 2013, Bastion 36 marque une volonté évidente de Marchal de retourner à ses fondamentaux, ne serait-ce que par le choix de son titre. Le cinéaste retrouve ses thématiques habituelles (guerre des polices, corruption, IGPN) et délaisse quelque peu l’action chic et choc de Bronx et d’Overdose pour un récit plus ancré dans les réalités sociales contemporaines de la police (la prime de risque dérisoire, les flics qui ne fument plus, les courses-poursuites qui ne sont plus permises par la hiérarchie, etc…).
Néanmoins, à travers les excès de ses personnages, le cinéaste continue malgré lui de prêter le flanc à cette gauche qui réclame régulièrement le désarmement de la police et diabolise à loisir les forces de l’ordre – un sujet politico-médiatique que l’intéressé aurait tout intérêt à aborder dans un futur projet, lui qui n’a jamais caché son mépris du politiquement correct.
Un réel manque de consistance
Malheureusement, le retour aux sources pour Olivier Marchal n’est que partiellement réalisé, comme s’il manquait un supplément d’âme à son récit. Outre la composition musicale d’Erwann Kermorvant, de moins en moins inspirée au fil des ans, l’écriture du scénario manque de consistance. Les personnages secondaires ne sont pas suffisamment caractérisés, se limitent à leur fonction policière, manquent cruellement d’à-propos, de second degré et, par conséquent, de relief.
Surtout, le film tourne en vase clos, communique peu avec son époque et se prive ainsi d’une analyse pertinente sur l’état de la société et sur ce que devient la police – il est d’ailleurs très révélateur qu’aucun plan extérieur du 36 rue du Bastion n’apparaisse à l’écran.
Marchal peut largement rebondir, il est sur la bonne voie pour ce faire, mais manifestement, Netflix ne lui réussit pas. Peut-être serait-il temps pour lui de prendre son envol et de revenir aux salles obscures, la maison mère du cinéma…
2,5 étoiles sur 5
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