Si les Français ne veulent pas la guerre avec la Russie, leurs dirigeants la souhaitent, pour masquer leur échec dans tous les domaines. La Russie ne souhaite pas la guerre avec l’Europe. Elle entend récupérer les régions russophones de l’est de l’Ukraine. Elle n’a pas le désir ni les moyens de se lancer dans une opération de conquête du Vieux Continent. Après l’entrevue mouvementée entre Trump et Zelensky à la Maison-Blanche, la présidente du groupe Renew au Parlement européen, Valérie Hayer, appelle à une « économie de guerre » en surjouant du péril russe, avec « 250 milliards d’investissements annuels pour se réarmer et ne plus dépendre des États-Unis ». Le ministre de l’Économie Éric Lombard plaide également pour une économie de guerre. À la question de savoir si la situation était celle d’une «économie de guerre», il a répondu : « On n’y est pas mais il le faut. »
Trump l’a dit à Zelensky : « Vous jouez avec la troisième guerre mondiale » . C’est aussi ce que fait la nomenklatura française et européenne. Au lendemain de la rencontre entre Donald Trump et Volodymyr Zelensky, la députée européenne Renaissance plaide pour une transformation radicale de la stratégie européenne en matière de défense. « C’est au tour de l’Europe d’être l’arsenal de la démocratie », c’est-à-dire d’assumer le leadership du monde libre, considérant qu’avec Trump à leur tête, les Etats-Unis sont maintenant une dictature. On fera remarquer à Madame Hayer que c’est pourtant en France, et non aux Etats-Unis, que le pouvoir ferme des chaînes de télévision…
En parlant d’« arsenal de la démocratie », Hayer fait allusion à une émission radiophonique diffusée en décembre 1940 lors de laquelle le président américain Franklin D. Roosevelt promettait d’aider le Royaume-Uni à combattre l’Allemagne nazie en lui vendant des fournitures militaires pendant que les États-Unis restaient à l’écart des combats. Hayer pense-t-elle sérieusement que l’Europe puisse rapidement atteindre les capacités de dissuasion des Etats-Unis et faire jeu égal avec la Russie en matière d’armement ? Toujours est-il qu’elle a prôné l’« économie de guerre » comme moyen.
« On a su le faire avec la crise sanitaire, on a su demander (sic) à nos industries de se mettre en branle pour produire de manière urgente des vaccins. Il faut que l’on fasse la même chose sur la question de la défense européenne », a insisté Hayer. Avant de poursuivre : « Il faut un plan d’action très concret, à la fois en soutien à l’Ukraine, mais aussi pour nous réarmer, nous défendre nous-mêmes. »
Selon la présidente du groupe Renew Europe, cela suppose de mettre en place « des investissements massifs » à hauteur de « 250 milliards d’euros par an » afin de pouvoir « se protéger contre la Russie sans l’aide des États-Unis », mais aussi de financer un « emprunt en commun » et de favoriser la « préférence européenne pour soutenir nos industriels ». À ce sujet, Valérie Hayer juge que l’Europe doit rattraper son retard étant donné que « 80 % des équipements utilisés en Europe » sont produits en dehors de son territoire – et 60% aux Etats-Unis. « On est dépendants d’autres puissances dans un monde de plus en plus hostile […] Il faut que l’on crée les conditions de notre propre sécurité », insiste-t-elle. Des conditions incompatibles avec l’ultra-libéralisme prôné par Bruxelles. Reste à savoir si la Commission européenne donnera son accord pour cette entorse à une concurrence « libre et non faussée ». Quid de l’Allemagne et de la Pologne qui sont les plus gros importateurs européens d’armement américain ?
De son côté, Éric Lombard a également prôné le passage à une « économie de guerre ».
Le ministre de l’Économie a appelé l’UE à «retrouver une totale autonomie» en matière de défense, disant vouloir mobiliser davantage l’investissement privé vers ce secteur, dans un entretien au Parisien ce dimanche 2 mars. « L’objectif doit être une autonomie stratégique européenne à l’intérieur de l’Otan, dont le rôle n’a pas été remis en cause par le président Trump », a également assuré le ministre.
« Aujourd’hui, les États-Unis gardent un droit de regard sur les armes, d’où la nécessité de retrouver une totale autonomie », a-t-il ajouté, qualifiant de « bascule historique » la vive altercation entre Trump et Zelensky. À la question de savoir si la situation était celle d’une « économie de guerre », il a répondu : « On n’y est pas mais il le faut. »
« Le 20 mars, à Bercy, avec Sébastien Lecornu (ministre des Armées), nous rendrons compte publiquement de notre action visant à mobiliser les banques, les investisseurs français afin de développer la base industrielle et technologique de défense », a promis Éric Lombard. « C’est par l’action que nous répondrons aux anxiétés et que nous nous protégerons ». Le ministère de l’Économie et des Finances a précisé qu’il s’agissait d’un événement visant à permettre de faciliter l’investissement privé dans les structures industrielles et technologiques de défense.
Lors d’échanges avec des internautes en février, le président Emmanuel Macron n’avait pas exclu de «lancer des produits d’épargne» pour soutenir le financement de programmes de défense, estimant que la France devrait «monter» la part de son PIB qu’elle y consacre, d’environ 2 % aujourd’hui.
Le Premier ministre François Bayrou avait dit jeudi dans un entretien au Figaro souhaiter que les dépenses militaires soient exclues des règles européennes qui plafonnent le déficit public à 3 % du PIB. Une pirouette comptable qui contiendra artificiellement l’envolée du déficit budgétaire de la France. Rappelons que ce dernier a été de 6,2 % en 2024.
Selon le ministre de l’Économie, « c’est techniquement possible, mais il faut maîtriser notre dette. D’autres pays européens ont plus de marges de manœuvre », alors que la France affiche déjà un déficit public record.
La ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, a quant à elle jugé urgent samedi que l’Allemagne et l’UE assouplissent leurs règles budgétaires afin de dégager des moyens supplémentaires pour renforcer leur défense et aider l’Ukraine. Alors que le futur chancelier Friedrich Merz a souhaité que la France et la Grande-Bretagne mutualise avec l’Allemagne leur dissuasion nucléaire et que le président Macron s’est dit prêt à en discuter. Des propos lourds de sens qui ont suscité l’ire de Marine Le Pen. Depuis le Salon de l’agriculture, la chef de l’opposition a affirmé que la France ne « devait pas partager sa dissuasion et encore moins la déléguer ».
Henri Dubost
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