Une conférence de
la philosophe Sylviane Agacinski aux Semaines sociales de France 2012
sur la pertinence de la différence homme-femme. Une réflexion de fond
pour nourrir le débat sur l’accès des couples homosexuels à la
parentalité.
Depuis quelque temps, la différence sexuelle est
mise en cause, au point que la distinction homme-femme serait devenue
non pertinente. Sylviane Agacinski retrace l’histoire de cette
différence, marquée par une hiérarchisation qui s’efface peu à peu
aujourd’hui dans les sociétés occidentales. La subordination de la femme
à l’égard de l’homme est en cours de déconstruction, et l’égalité tend à
remplacer la hiérarchisation. Dès lors, la philosophe pose la question
suivante : Quel est le fondement de la différence ? En quoi
consiste-t-elle ? A-t-elle encore un sens ? Et, s’ils sont égaux, les
deux sexes sont-ils pour autant équivalents ?
Sylviane Agacinski montre comment un courant de pensée contemporain,
hyperculturaliste, voudrait imposer l’idée que l’être humain est
intégralement le produit de sa propre construction, sociale, culturelle
et technologique. Il soustrait la condition humaine à toute condition
naturelle, et veut promouvoir la différence des sexualités, à la place
de la différence des sexes. Or, pour la philosophe, la différence des
sexualités n’efface pas la différence sexuelle : on ne peut pas parler
d’homosexualité, de bisexualité ou d’hétérosexualité si l’on ne pose pas
a priori l’existence d’au moins deux sexes, qui ne sont pas
équivalents. La différence sexuelle ne se comprend qu’à partir du schéma
de la génération : le sexe, c’est un pouvoir d’engendrer, un pouvoir
mâle, et un pouvoir femelle.
Aujourd’hui, le recours aux procréations médicalement assistées a
bouleversé ce schéma. Le recours à l’adoption, aux PMA ou aux mères
porteuses pourrait instituer comme couples parentaux des couples
homosexuels. Pourquoi ne pas tenir comme équivalents les deux types de
couples ? Pour Sylviane Agacinski, la dépersonnalisation et
l’organisation d’une procréation secrète (anonymat des donneurs de
gamètes, notamment) a de graves conséquences pour les enfants. Les
enfants ont besoin de savoir à quelles personnes ils doivent la vie,
pour pouvoir s’inscrire dans une histoire humaine, refusant d’être des
produits fabriqués. Et, même si la légitimité des liens homosexuels est
acquise, cela justifie-t-il le droit d’écarter l’autre sexe de la
naissance d’un enfant ? Le problème des enfants à venir, c’est que
personne ne les représente dans le débat politique. La philosophe
appelle à une réflexion anthropologique et éthique collective.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire