Lorsque pour la première fois tu as discerné, venant à
toi, les fantasmes irréels et insupportables de quelque chose dont tu
ne soupçonnais pas l’étendue, ta résistance a commencé. Intellectuelle
d’abord, elle est devenue morale lorsque tu as rencontré la méchanceté
et la bêtise. Alors tu es devenu Veilleur, tu t’es fait Campeur, tu as
tapissé les murs de ta ville aux couleurs de ce que tu sais être la
Vérité.
Quelques mois plus tard. Tu as laissé surgir du fond
de toi la force, celle qui dit « Non », celle qui s’oppose, celle qui
affronte et refuse. Insolent, tu as bravé les interdits en secouant des
barrières ou enchaîné sur les avenues de la capitale. Jeune et
impétueux, tu as parfois laissé ton cœur exprimer sa rage face aux
boucliers et aux matraques, n’ayant plus peur de la garde à vue et de ce
qui pourrait surgir.
Il est exaltant ton visage rougi par
l’enthousiasme, avec ses yeux larmoyants, son front tuméfié et ses
lèvres sanguinolentes ! Et pourtant ça n’est pas ce que je souhaite
voir.
Jeune résistant, je crains pour toi. Tu viens de
marcher sur la queue de Léviathan tout en serrant sa gorge. Je crains
pour toi face à ce monstre à sang froid. Je crains que pris par ta
fougue tu oublies que pour lui, tu n’es rien. Je crains qu’il ne fasse
qu’une bouchée de toi. Il a commencé à montrer ces dents et tu ne les as
pas vues, alors que je les sais prêtes à te briser. Léviathan ne se
laisse pas abattre si facilement
Tes gardes à vue, le gaz que tu inhales, les coups
qui te scandalisent… ne sont que l’application de sa règle. Pour lui,
tout cela est normal, Tu n’as vu que la queue de Léviathan. Et ce bout
ne te laisse pas imaginer ce qu’il peut y avoir derrière.
Abattre ou dompter Léviathan n’est pas le travail
d’un jour. Il faut du temps pour l’affaiblir et le contraindre. Pour
enfin lui faire rendre gorge. C’est de cela que je voudrai t’entretenir.
Prends garde à toi. Tu ne sais pas à quoi tu
t’attaques. Fixe-toi des objectifs moindres mais réalisables. Amènes à
ton combat petit à petits ceux qui vivent sur ton coin de terre. Donne à
ton action une portée immense. Ebranle les structures sans en avoir
l’air. Et surtout, sors de ton cadre pour aller voir ce qui se passe
ailleurs. Engages toi dans des actions sociales. Autant que ton
militantisme, elles te porteront et te forgeront. Et enfin, demain,
quand le temps sera venu et que nous le saurons, nous porterons tous
l’estocade à l’anti-Homme.
En attendant ce jour, je te croiserai avec joie dans les rues de nos villes ou sur les chemins de nos campagnes. Et nos cœurs se reconnaîtront parce que nous avons le même amour de la vérité. Noverim te http://www.printempsfrancais.fr
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