Cet article
analyse les faiblesses du volet politique de l'opération Sangaris, dès
le départ et au fur et à mesure que la situation se détériore :
apparition d'une troisième force en présence modifiant de fond en comble
le contexte de l'intervention française, et transformation du conflit
politique en guerre interconfessionnelle. Résultat :
"Les ex-Séléka, les miliciens du Nord, accusent [les forces françaises] de vouloir les laisser désarmés face à la vengeance populaire, eux et leurs coreligionnaires musulmans. La majorité non musulmane, qui attendait de la France qu'elle renverse le président Djotodia et chasse les ex-Séléka détestés, reproche à présent à la France de les maintenir en place. Pour tout compliquer, des contingents de la force panafricaine prennent parti pour un camp ou pour l'autre, allant jusqu'à échanger des coups de feu entre eux."
Tout bascule le 5 décembre, jour du vote de l'ONU :
"l'attaque des Anti-Balaka [une jacquerie qui veut chasser les rebelles musulmans de l'ex-Séléka] sur Bangui modifie de fond en comble le contexte de l'intervention française. Si cette attaque échoue, elle déclenche une terrible répression de l'ex-Séléka dans les quartiers populaires de Bangui. À part quelques missions de protection de ressortissants, les troupes françaises n'interviennent pas: depuis Paris, les ordres sont d'attendre le mandat de New York.
Lorsque la résolution est adoptée le
même soir, les rues de Bangui sont jonchées de cadavres et le cycle de
la guerre confessionnelle est enclenché. Ce millier de morts pèsera
lourd sur la suite des opérations. Au lieu de pouvoir utiliser Bangui
comme base arrière et se déployer en province comme c'était prévu
initialement, les soldats français vont devoir agir dans l'urgence dans
la capitale, pour tenir à l'écart des communautés qui s'affrontent. Tout
le processus politique est par terre."
Et que fait Paris ?
"Pendant ce temps, l'ambassadeur de France à Bangui, personnage clef du dispositif, est remplacé au beau milieu de cette semaine folle, ainsi qu'un autre diplomate important. Hollande annonce que Djotodia doit partir, avant que Jean-Yves Le Drian et Laurent Fabius ne disent l'inverse. La mort de deux paras trois jours après le début des opérations fait encore changer de posture les forces françaises, renforçant la détermination des uns et des autres à pousser leur avantage. Et les visites officielles se succèdent, Hollande d'abord, Le Drian quelques jours plus tard, augmentant le fardeau opérationnel des unités débordées."
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