Toujours le 17 juin 1940, le Maréchal Pétain s’adresse aux Français à la radio : « Je fais à la France le don de ma personne ». Le lendemain, 18 juin, la BBC ouvre ses studios à de Gaulle qui lance un premier appel aux militaires Français, resté célèbre dans l’histoire même si peu de français l’ont entendu, « Quoi qu’il arrive, la flamme de la résistance ne doit pas s’éteindre et ne s’éteindra pas ». L’armistice est signé le 22 juin 1940 avec l’Allemagne (d’un coté, par le général Charles Huntzinger et l’ambassadeur Léon Noël, et de l’autre, par le général Wilhelm Keitel) et le 24 avec l’Italie (par le général Huntzinger, le maréchal Pietro Badoglio et le ministre Galeazzo Ciano). Le 23 juin, la nomination de Charles de Gaulle au grade de général à titre temporaire est annulée pour être sorti de France sans autorisation et avoir fait un acte politique à la radio de Londres. Rétrogradé au rang de colonel, de Gaulle est mis à la retraite d’office par un décret signé du président de la République Albert Lebrun. Mais le 28 juin 1940, le gouvernement britannique de Churchill reconnaît de Gaulle comme « chef des Français libres ».
Pour de Gaulle l’armistice est déshonorant et inacceptable. Une fois l’armée démobilisée, la flotte, les avions, les chars, toutes les armes seront livrées intactes à l’adversaire nazi, qui pourra s’en servir contre les alliés de la France. La patrie et son gouvernement seront réduits à la servitude. C’est une lâcheté, une forfaiture, un crime. Créant le Comité national français, organisme gouvernemental en exil, Charles de Gaulle n’hésite pas à défier la légalité et la légitimité du gouvernement de Pétain, formé à la demande du président de la République et confirmé le 10 juillet par le vote des deux chambres réunies à Vichy (Chambre des députés et Sénat).
De Gaulle, qui a connu jusqu’alors une carrière militaire estimable, va se révéler à la tête de la France libre un homme politique hors pair, le plus doué de tous les hommes politiques français du XXe siècle. « Dans les temps de révolutions, écrit Talleyrand, on ne trouve d’habileté que dans la hardiesse, et de grandeur que dans l’exagération ». Le chemin sera parsemé d’embuches et d’obstacles ; il y aura plus de chardons et d’épines que de fleurs, mais de Gaulle sortira vainqueur de la plupart des batailles politiques qu’il livrera. Le 3 juillet 1940, coup sur coup, sans qu’il en soit informé, la marine britannique capture l’escadre française mouillée à Alexandrie, les fusiliers marins de sa Gracieuse Majesté s’emparent des navires français réfugiés dans les ports anglais, et la flotte anglaise aux ordres de l’amiral James Somerville coule l’escadre française désarmée dans la rade de Mers el-Kébir (1300 marins français sont tués). Le 2 août, de Gaulle est condamné à mort par contumace et à la dégradation militaire par un conseil de guerre présidé par le général Aubert Frère (futur chef de l’Organisation de résistance armée, qui mourra en déportation en Allemagne). Le 23 septembre c’est l’échec de l’opération de débarquement franco-britannique à Dakar, repoussé par les troupes du gouvernement de Vichy aux ordres de Pierre-François Boisson, gouverneur de l’AOF (Afrique occidentale française). Un an plus tard, en juin 1941, lorsque les forces anglo-gaullistes pénètrent en Syrie et au Liban elles se heurtent à l’armée du gouvernement de Vichy. Un armistice est conclu, mais seulement entre les Anglais et Vichy ce qui entraîne une grave crise entre Churchill et le chef de la France libre mis devant le fait accompli.
En juillet 1940, dans les premiers jours de la France libre, les partisans de De Gaulle sont une poignée d’hommes. Les 50 000 français présents en Angleterre sont pour la plupart rapatriés, seuls 1200, en majorité des jeunes nationalistes ou patriotes très à droite, choisissent de rester avec lui. Lucide, le Général conviendra tristement des années plus tard: « Sur 39 millions d’habitants, c’est bien peu ». Mais trois ans plus tard, à l’été 1943, ils seront entre 50 000 et 70 000 (dont 32 000 coloniaux d’AOF qui ne sont pas des citoyens français). Après le débarquement américain en Afrique du Nord de novembre 1942, et le ralliement subséquent de l’Armée d’Afrique de Vichy (généraux Jean De Lattre, Alphonse Juin, Henri Giraud), l’effectif s’élèvera à plus de 300 000 hommes.
L’autorité de De Gaulle sera finalement admise mais non sans de nombreux conflits ouverts ou de sévères frictions. À Londres, la première forme d’opposition antigaulliste vient, d’une part, des intellectuels et des journalistes de la revue France-Libre, fondée par André Labarthe et Raymond Aron, et, d’autre part, de certains animateurs de Radio-Londres (Robert Mengin). Ces Français libres, qui ont l’oreille du Département d’État américain, ne cessent de critiquer le « bonapartisme » du Général, voire « les tendances fascistes » de « l’apprenti dictateur » « issu de l’Action Française » et de « la Cagoule ». Pour leur part, les vichyssois d’Afrique du Nord, qui sont passés dans le camp de la lutte contre l’Allemagne après avoir résisté mollement au débarquement américain (8 novembre 1942), et assisté impuissants à l’invasion allemande de la zone libre (11 novembre 1942), ne sont pas non plus très convaincus. Alger est un temps un véritable nid de vipères. Le général Maxime Weygand, partisan de la « Révolution nationale » et fidèle au Maréchal, incarne une tentative de « résistance pétainiste ». Il s’efforce de renforcer l’Armée française d’armistice, plus particulièrement celle d’Afrique, mais arrêté par la Gestapo, il est placé avec Daladier, Reynaud et Gamelin en résidence surveillée dans le Tyrol autrichien (château d’Itter). L’amiral François Darlan, ex-dauphin de Pétain, se rend à Alger et se rallie aux Américains en novembre 1942, après bien des hésitations et des volte-face.
Après l’invasion de la zone libre, le sabordage de la flotte française dans la rade de Toulon est ordonné, le 27 novembre 1942, par l’amirauté de Vichy en accord avec les consignes de 1940 (qui avaient été ordonnées par Darlan lui-même dans le cas où une puissance étrangère essaierait de s’emparer des bâtiments français). Un mois plus tard, Darlan est arrêté et assassiné à Alger sur ordre du résistant royaliste, farouchement anti-vichyste, Henri d’Astier de la Vigerie. Le général Giraud, évadé d’Allemagne avec l’aide de membres du 2º bureau de Vichy, incarne pour sa part la résistance de la droite traditionnelle. Un temps pressenti par les Américains et les Anglais, pour contrer de Gaulle, il est définitivement écarté du Comité français de libération nationale (CFLN) en avril 1944. Deux autres généraux ex-vichystes, Juin et De Lattre s’illustreront, l’un à la tête du corps expéditionnaire français en Italie, l’autre, lors du débarquement en Provence et lors de la campagne Rhin et Danube. En fait, un des rares officiers ralliés de la première heure à de Gaulle est le capitaine Philippe Leclerc, un ancien sympathisant de l’Action Française qui sera général en août 1944. Sa division (2e DB), débarquera en Normandie le 1er août 1944, un mois après les Alliés, et participera activement, avec les Américains, à la libération de Paris et de Strasbourg.
L’autorité de De Gaulle sur la France libre a été tout aussi longtemps discutée au sein des Alliés. Le double jeu des anglais et des américains a été quasi permanent pendant toute la guerre. Roosevelt ne cesse de ménager le maréchal Pétain, n’écartant pas l’idée de s’appuyer dessus pour reconstruire la France quand viendra la libération. Il gagne du temps, espérant trouver un représentant français plus docile, moins irréductible que de Gaulle. On pense aux Vichystes qui se sont ralliés après 1942 aux Alliés, aux généraux Weygand et De Lattre, puis à l’amiral Darlan, puis au général Giraud. Les Américains ont pour projet de faire administrer la France libérée par les armées et ils n’en démordent pas. À ce propos, de Gaulle confie à son fils : «Roosevelt ne se soucie que d’occuper la France comme il occupera l’Allemagne nazie. Il veut transformer notre pays en condominium [un territoire sur lequel plusieurs États souverains exerceraient une souveraineté conjointe, NDLA], et Churchill n’est pas loin de préconiser la même chose. » Churchill semble lui donner raison lorsqu’il lui confie: « Chaque fois qu’il nous faudra choisir entre l’Europe et le grand large, nous choisirons toujours le grand large ».
Lors du débarquement d’Afrique du Nord, en novembre 1942, de Gaulle est tenu à l’écart par les Américains ; en mai 1943, Roosevelt et Churchill exigent de Gaulle qu’il coopère avec le général Giraud ; en juin, le vice-amiral Émile Muselier, Français libre de la première heure, rejoint le camp du général Giraud. La Maison-Blanche lutte de façon sourde et dissimulée, et jusqu’au bout, contre de Gaulle. Son unique et véritable allié, le seul ami américain d’importance, semble être le général Dwight Eisenhower. Réaliste, de Gaulle constate : « Jusqu’au dernier jour de la guerre, nous aurons dû nous battre aussi sur ce front là. Mais il faut bien dire que dans une guerre d’alliance, chaque allié fait en réalité sa guerre à lui et non celle des autres. » Il ajoute sans davantage de détours : « Les Anglais qui sont morts en libérant la France, ont donné leur vie pour la Grande-Bretagne et le roi. Les Américains qui sont morts en libérant la France, sont morts pour les États-Unis d’Amérique et pour personne d’autre. De même que tous les Français qui sont morts sur un champ de bataille, y compris pour l’indépendance des États-Unis d’Amérique, sont morts pour la France et le roi qui l’a personnifiée ».
Le 6 juin 1944, à la veille du débarquement en Normandie, de Gaulle est encore tenu à l’écart par les Alliés. Le 4 février 1945, lors de la conférence de Yalta, la France est absente. Elle l’est aussi lors de la conférence de Potsdam, en août 1945. Mais le 8 mai 1945, à Berlin, lors de la capitulation allemande, le représentant français est signataire et non pas seulement témoin comme le 7 mai à Reims. De Lattre signe comme les trois généraux Alliés, le Britannique, A.W. Tedder, le Soviétique G. Joukov et l’Américain Carl Spaatz. De Gaulle, qui a toujours été conscient des faiblesses de la France et de l’ampleur des forces armées mobilisées pendant la Seconde Guerre mondiale, dira à Georges Pompidou, en 1950 : « nous avons bluffé ». Quoi qu’il en soit, en 1945, après huit mois d’âpres négociations, il parviendra à imposer la voix de la France à l’ONU. Grâce à lui, la France sera l’un des cinq membres permanents au conseil de sécurité des Nations unies.
Jusqu’en 1943, les résistants de l’intérieur de la France ne sont pas, eux non plus, loin s’en faut, des partisans unanimes du général de Gaulle. En 1941, la résistance, surtout nourrie de jeunes idéalistes patriotes et nationalistes, est relativement marginale. Dans un deuxième temps, après l’invasion allemande de l’URSS, le 22 juin 1941, un premier groupe de communistes rejoint le combat. Jusqu’alors, les communistes français ont fraternisé avec l’occupant au nom de la « lutte contre la bourgeoisie capitaliste ». Le bureau politique du PCF a même adressé, le 25 juin 1940, une lettre à la Kommandantur allemande de Paris pour demander l’autorisation de faire reparaître le journal l’Humanité au nom du pacte germano-soviétique (23 août 1939). Cela n’empêchera pas le PCF de se présenter à la Libération comme le premier parti résistant de France, divulguant inlassablement le mythe des 75000 fusillés communistes, alors que les historiens en dénombrent moins de 4000. La propagande communiste prétendra aussi que le Secrétaire général du PCF, Maurice Thorez, était le « premier des résistants communistes », alors qu’il avait déserté le 3 octobre 1939 et avait passé toute la durée de la guerre en URSS (Gracié par de Gaulle, au nom de la realpolitik, il sera ministre d’État avec trois autres ministres du PCF dans le second gouvernement provisoire du chef de la France libre, de novembre 1945 à janvier 1946, puis, vice-président du conseil en 1947).
En réalité, c’est seulement à partir de l’invasion de la zone libre, en novembre 1942, et surtout à partir des grandes défaites allemandes sur le Front de l’Est, en 1943, qu’on peut vraiment parler d’une résistance antiallemande et anti-pétainiste. Beaucoup d’historiens sont d’accord sur ce point : la faute capitale de Pétain a été de ne pas quitter la France en novembre 1942. « S’il était parti, disait de Gaulle, il revenait sur son cheval blanc, en vainqueur comme en 1918 ». Jusqu’à la fin de l’année 1942, on pouvait être à la fois pétainiste et résistant[2].
La doctrine Pétain c’était avant tout l’attentisme, cet attentisme qui ulcérait autant les gaullistes de Londres et les résistants de l’intérieur que les authentiques fascistes, anti-vichyssois et ultras de la collaboration de Paris. En vieillard entêté, Pétain imaginait pouvoir permettre à la France de reconstituer ses forces à l’abri de sa neutralité. Il attendait que les jeux soient faits entre les divers belligérants en espérant pouvoir ainsi réapparaître un jour. Un exemple frappant de pétainiste passant à la résistance, tout en étant antigaulliste, est celui du futur ministre de la IVe République, président de la Ve République, François Mitterrand. Au printemps 1943, parrainé par deux membres du cabinet du maréchal Pétain, Mitterrand est décoré de l’ordre de la Francisque, plus haute distinction du régime de Vichy. Mais en novembre, il se rapproche de l’ORA (Organisation de résistance de l’armée qui est giraudiste) et entre dans la clandestinité.
Au début de 1943, les diverses organisations de la Résistance regroupent 40 000 personnes, un effectif qui s’élève bientôt à 100 000 puis à 300 000 au moment de la Libération. Bien sûr, comme dira de Gaulle, sur ces 300 000 résistants « beaucoup ont résisté sans avoir porté les armes ». Par ailleurs, la moitié a fui le STO (Service du travail obligatoire) alors que 700 000 hommes sont allés travailler dans les usines allemandes, soit requis, soit volontairement (comme le futur Secrétaire général du PCF Georges Marchais).
Contre vents et marées, de Gaulle résiste. Sa ténacité, sa persévérance, seront finalement couronnés de succès. Dans le difficile processus d’unification de la Résistance deux étapes sont essentielles : la création du Conseil national de la Résistance, le 27 mai 1943, par le délégué de De Gaulle Jean Moulin, et celle des Forces françaises de l’intérieur (FFI), le 1er février 1944, par son autre délégué Jacques Bingen. À Alger, de Gaulle l’emporte sur tous ses concurrents. Le 3 octobre 1943, il devient le seul président incontesté du Comité français de libération nationale (CFLN). Un an plus tard, le 14 juin 1944, à Bayeux, il a l’immense plaisir de prononcer un premier discours sur le sol de la France libérée. Le 26 août, de Gaulle descend triomphalement les Champs-Elysées.
Le 13 novembre 1945, il sera élu à l’unanimité président du gouvernement provisoire par les députés de l’Assemblée constituante. Le Général présidera deux gouvernements de juin 1944 à janvier 1946. Mais partisan d’un régime doté d’un exécutif fort, il se heurtera vite aux socialistes, aux communistes et aux démocrates-chrétiens qui n’en veulent pour rien au monde. La vieille caste dirigeante de la IIIe République, que l’on croyait définitivement discréditée par la défaite et l’occupation, refait surface et s’empare à nouveau des grands leviers d’action de l’État. De Gaulle, qui dénonce le régime exclusif des partis, se voit obligé de démissionner le 20 janvier 1946.
Arnaud Imatz, 1er juin 2020
Docteur d’État ès sciences politiques
Membre correspondant de l’Académie royale d’histoire d’Espagne
[1] Le Général tenait à observer une stricte séparation entre sa vie privée et sa fonction de président. Il avait fait installer, dès son arrivée à l’Élysée, une minuscule chapelle pour pouvoir assister régulièrement à la messe. Il avait demandé à son aide de camp de lui trouver tous les objets nécessaires au service religieux et les avait payés sur ses propres deniers. On sait que sa femme avait même acheté un service de table ordinaire pour les repas privés et que De Gaulle payait scrupuleusement la part des invités lors des quelques repas de famille.
[2] La petite histoire anecdotique sert parfois à éclairer la grande. L’expérience de ma famille peut ainsi contribuer, dans une certaine mesure, à nuancer la vision d’une Résistance monolithique et univoque. Dans les années trente, mes grands-parents maternels avaient un hôtel dans la ville frontalière d’Hendaye (Grand Hôtel Imatz). Cet hôtel, qui avait reçu de nombreux journalistes européens et américains pendant la guerre d’Espagne, était assez régulièrement fréquenté par Philippe Pétain à l’époque où il était ambassadeur à Madrid. Le Maréchal devait même y fêter son anniversaire en 1939. Sa femme, Annie, avait fait le choix de cet établissement, préférant son ambiance familiale et conviviale à celle plus somptueuse de l’Hôtel du Palais à Biarritz. Au fil du temps, la maréchale et ma grand-mère, Marie Imatz (veuve depuis un an de mon grand-père hôtelier et ancien poilu de Verdun) étaient devenues amies. En juin 1940, à l’heure de l’exode, Annie Pétain résidait dans l’hôtel. Elle avait pris pour habitude de venir s’asseoir dans le bureau de ma grand-mère, proche de la réception, pour converser avec elle ou jouer aux cartes avec mon arrière-grand-mère. Au cours des semaines précédant l’arrivée des troupes allemandes à la frontière, de nombreuses familles de réfugiés, en particulier des familles juives, vivaient à l’hôtel dans l’attente d’un visa pour l’Espagne. Chaque jour, ma grand-mère traitait une nouvelle pile de documents d’identité déposée préalablement sur sa table de travail. Ses connaissances de part et d’autre de la frontière (mon grand-père défunt ayant été bien connu en Espagne pour ses convictions carlistes) aidaient à l’obtention la plus rapide possible des précieux visas. Les gestions qu’elle effectuait au vu et au su de la maréchale ne devaient jamais susciter chez elle le moindre commentaire désapprobateur, bien au contraire. Le 27 juin 1940, dès l’arrivée de l’occupant, l’hôtel a été réquisitionné pour loger la troupe et installer une DCA sur la terrasse du toit (Il sera à nouveau réquisitionné par les FFI, en 1944, et cette fois pillé et totalement saccagé par des maquisards venus de Toulouse). Ma grand-mère, ses quatre filles, le personnel et les clients, dont la maréchale, ont été expulsés trois jours plus tard. Une résidence secondaire inoccupée sur le front de mer ayant été réquisitionnée par les Allemands pour reloger les membres de ma famille (Villa Gravelines), Annie Pétain a demandé à les suivre et a vécu ensuite avec eux pendant deux mois. Au cours de l’année 1942, la maréchale a fait à nouveau un bref séjour de quatre jours dans ma famille qui vivait alors dans la maison de mon arrière-grand-oncle (Villa Alexandrine). Cette amitié entre Annie Pétain et ma grand-mère, n’a pas empêché cette dernière de recevoir la même année et dans cette même villa le commandant Jacques Pigeonneau (un des premiers diplomates français ralliés à De Gaulle, ami personnel du colonel Rémy et fondateur du réseau Espagne) et de l’aider à trouver des passeurs pour franchir clandestinement la frontière. Marie Imatz était en contact avec le Père Armand Fily, correspondant de l’ORA à Hendaye (déporté à Dachau en 1944, accusé plus tard, en raison de son anticommunisme, d’avoir appartenu à la Cagoule), qui agissait sous la direction de Jacques Chaban-Delmas, futur premier ministre de De Gaulle. Elle était aussi en contact avec le Dr. Alberto Anguera Anglés, un médecin Espagnol d’Irun qui se chargeait d’acheminer le courrier des évadés qui, une fois libérés du camp de Miranda, rejoignaient le Maroc pour être très souvent accueillis dans la propriété de mon arrière-grand-tante, veuve d’un colon ex-officier méhariste, ami de Lyautey. Quant à ma famille paternelle, elle était particulièrement affectée par la division entre pétainistes et gaullistes. Alors que mon grand-père paternel, grand mutilé de guerre, l’un des sous-officiers de carrière les plus décorés de la Première guerre mondiale, était un pétainiste irréductible, ses quatre fils (conflit de génération ?), qui vivaient avec lui sous le même toit, étaient de farouches gaullistes ; le fils aîné, mutilé lors de l’embarquement de Dunkerque (décédé plus tard des suites des ses blessures), était paradoxalement le plus anglophile (bien qu’il ait été abandonné sur la plage par les troupes de sa Gracieuse Majesté, comme ses autres camarades français). Je dois sans doute au récit de ces expériences familiales, qui ont bercé mon enfance, le crédit relatif, toujours « sous bénéfice d’inventaire », que j’accorde depuis aux journalistes officieux et autres experts ou historiens prétendument institutionnels.
https://cerclearistote.com/2020/06/charles-de-gaulle-mythifie-mais-trahi-i-iii-par-arnaud-imatz/
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