Nous vous proposons de découvrir ci-dessous la traduction française de l’interview donnée par le Premier ministre de Hongrie, Viktor Orbán, lors de l’émission Good Morning Hungary, animée par Zsolt Törőcsik. L’occasion de découvrir le point de vue du dirigeant hongrois sur la crise majeure qui frappe aujourd’hui l’Union Européenne du fait de la situation en Ukraine.
Zsolt Törőcsik : La situation des prix de l’énergie en Europe occidentale devient de plus en plus intenable, et ce n’est vraiment pas une question de quantité d’énergie disponible, mais de savoir s’il y a de l’énergie tout court. Je ne pense pas que beaucoup d’entre nous aient cru que la pandémie serait suivie d’une crise encore plus grave, et que la situation là-bas toucherait également la Hongrie. Dans quelle mesure cela est-il impactant ?
Viktor Orbán : Nous assistons effectivement à une guerre des prix de en Europe. Le jeudi 24 février – si je m’en souviens bien – personne n’aurait pensé que ce qui était apparu n’était pas simplement un conflit ou une guerre entre l’Ukraine et la Russie, mais qu’une ère se terminait et que nous entrions dans une nouvelle phase de l’histoire européenne : une ère de guerres.
Et cela a un impact. Il est vrai que la Hongrie essaie de rester en dehors de cette guerre, et nous devons rester vigilants afin de veiller à ce que le conflit armé ne s’étende pas à la Hongrie. Mais nous devons aussi reconnaître que cette guerre ne se déroule pas seulement sur les lignes de front, mais aussi dans l’économie mondiale – ou du moins dans l’économie européenne ; et nous devons reconnaître qu’une partie de cette guerre est l’augmentation des prix de l’énergie, avec une inflation de guerre, des prix de guerre, et que cela remet en question tout ce à quoi nous sommes habitués. Nous pouvons dire que nous avions une vie moderne et sûre, et les conditions de base pour cela existaient dans toute l’Europe.
Bien sûr, certains gouvernaient mieux que d’autres, d’autres moins, mais rien ne remettait en cause les conditions de base de la vie en Europe. Aujourd’hui, cependant, nous devons nous battre pour tout ce que nous avons considéré comme acquis. Il y aura deux grandes batailles ici, dont la première est en train de se dérouler. Il s’agit de la lutte pour l’énergie, pour freiner l’augmentation du coût de la vie, pour des prix des services publics tolérables. Mais il y aura aussi une bataille pour l’emploi. En effet, toutes les prévisions sur lesquelles je me base, les études et les analyses internationales, montrent que l’effet combiné de la politique de sanctions et de la guerre entraînera l’entrée en récession de l’économie européenne, en d’autres termes, le début d’une contraction ou d’une baisse des performances. Il y a toujours une pénurie de main-d’œuvre en Hongrie, mais je conseille à tous ceux qui ont un emploi et un travail de le valoriser et de tout faire pour le conserver ; car dans les mois à venir, nous pouvons nous attendre à un ralentissement de l’économie européenne
Zsolt Törőcsik : Mais nous sommes toujours dans la première bataille pour l’énergie. Il n’y a pas si longtemps, les Russes ont déclaré que l’exploitation de Nord Stream ne pouvait être garantie, et hier, le président Macron a déclaré que nous devions nous préparer à l’éventualité que le gaz russe cesse de circuler. Ici, en Hongrie, devrions-nous avoir davantage peur que l’énergie soit chère, ou qu’il n’y en ait pas ?
Viktor Orbán : La guerre a fait quintupler les prix de l’électricité et sextupler les prix du gaz. Maintenant, il y a des pays qui s’engagent dans la politique de sanctions. Le plus important serait que Bruxelles se rende compte qu’une erreur a été commise. Non seulement la politique de sanctions n’a pas répondu aux espoirs qui avaient été placés en elle, mais elle a eu l’effet inverse de celui escompté. Ils pensaient que la politique de sanctions ferait plus de mal aux Russes qu’aux Européens. Cela ne s’est pas produit, et nous avons été plus touchés. Ils pensaient que la politique de sanctions pourrait être utilisée pour raccourcir la guerre, avec la possibilité d’obtenir un succès rapide en affaiblissant la Russie. Cela n’a pas fonctionné non plus et, loin de réduire le conflit, de nous rapprocher de sa conclusion, la guerre s’éternise. Et la politique de sanctions ne peut en aucun cas nous y aider. Je dois dire qu’au début, je pensais que nous nous étions tirés une balle dans le pied, mais maintenant il est clair que l’économie européenne s’est tirée une balle dans les poumons, et partout nous voyons qu’elle est à bout de souffle. Dans certains pays, cela signifie qu’il n’y aura pas d’approvisionnement en énergie, pas de gaz naturel ; dans d’autres pays, il y aura du gaz, mais le prix sera très élevé.
Notre situation sera la seconde, car nous avons pris des décisions qui nous permettent d’obtenir la quantité d’énergie nécessaire. La question est de savoir combien de temps nous pourrons maintenir le coût de cette énergie dans des limites tolérables. Nous avons dû déclarer l’urgence énergétique, ce que nous avons fait lors du Conseil des ministres de mercredi. Vos auditeurs ont beaucoup entendu parler de cela, mais peut-être moins du fait que j’ai également ordonné la création d’un groupe opérationnel, qui sera dirigé par Gergely Gulyás. Sa tâche sera de mettre en œuvre ces décisions, ces décisions d’urgence en matière d’énergie, et d’en élaborer de nouvelles si nécessaire. Nous avons augmenté la production nationale de gaz naturel – ou demandé aux entreprises de l’augmenter. Il y a un débat sur la question de savoir si cela est même possible. J’ai écouté ce débat et voici la décision que nous avons prise : augmenter la production – notre propre production nationale – de 1,5 milliard de mètres cubes à 2 milliards. Nous avons autorisé le ministre des affaires étrangères, M. Péter Szijjártó, à acquérir de nouvelles réserves de gaz naturel, et il est déjà en passe d’obtenir 700 millions de mètres cubes de gaz supplémentaires. Nous avons imposé des interdictions d’exportation aux transporteurs d’énergie, à l’exception bien sûr des réserves que nous stockons pour d’autres sur une base locative. Nous fournirons ces quantités aux parties qui louent ces installations de stockage – car, après tout, nous sommes Hongrois. J’ai dû ordonner une augmentation de la production de lignite : actuellement, deux unités alimentées au lignite fonctionnent dans notre centrale électrique de Mátra, et deux autres sont en réserve ; j’ai dû ordonner l’activation de ces deux dernières unités. Nous avons également dû ordonner la prolongation de la durée de fonctionnement des unités déjà en service à la centrale nucléaire de Paks. Enfin, pour maintenir les réductions des charges des ménages, nous avons dû nous tourner vers une consommation supérieure à la moyenne. En d’autres termes, en essayant de préserver les réductions des charges des ménages, nous avons dû prendre une décision qui garantit que les réductions continueront à s’appliquer à ceux qui consomment une quantité moyenne d’énergie, tandis que ceux qui consomment plus que la moyenne devront payer le prix du marché pour cette énergie – ou essayer de réduire leur consommation en dessous du niveau moyen s’ils le peuvent. Je demande respectueusement aux Hongrois et aux familles qui consomment plus que la moyenne de reconnaître que nous sommes maintenant obligés de faire payer le vrai prix pour une consommation supérieure à la moyenne ; si nous ne le faisons pas, toute la politique de réduction de la facture énergétique des ménages devra être abolie.
Pour lire la suite, c’est ici !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire