par Larry Johnson
Je suis fasciné par la désinformation et la tromperie qui se répandent sur les réseaux sociaux au sujet du célèbre chef russe Evgueni Prigojine et de ses mythiques prouesses militaires. Le dernier exemple en date est fourni par le Washington Post de Jeff Bezos :
« Le chef de Wagner a proposé à l’Ukraine de lui communiquer l’emplacement des troupes russes, selon une fuite
The Discord Leaks – Evgueni Prigojine a déclaré qu’il indiquerait aux militaires ukrainiens où attaquer les troupes russes s’ils retiraient leurs propres forces de la ville assiégée de Bakhmout, où les mercenaires de Wagner subissaient de lourdes pertes. »
S’il y avait encore un doute sur le fait que les fameux « Discord Leaks », qui seraient l’œuvre d’un simple soldat de l’armée de l’air américaine, sont des fuites contrôlées qui font partie d’une opération d’information, ce dernier coup d’éclat devrait effacer tout scepticisme.
Suivez la logique. Il est supposé exister un élément de renseignement d’origine électromagnétique top secret « prouvant » que Prigojine a proposé de trahir la Russie afin de protéger ses propres troupes il y a deux mois (rappelez-vous, la « fuite » « découverte » le 6 avril par un groupe lié aux services de renseignement britanniques, faisait état d’informations classifiées diffusées vers le 1er mars). Comment Prigojine, qui n’a aucune expérience militaire et ne fait pas partie de la chaîne de commandement russe, peut-il avoir accès à l’ordre de bataille des forces russes ? C’est peu probable.
Le groupe Wagner n’est pas une création d’Evgueni Prigojine. Oubliez l’idée reçue occidentale selon laquelle Wagner serait une version russe des « douze salopards » – des condamnés et des criminels à qui l’on donne une chance de se racheter en revêtant l’uniforme russe et en risquant leur vie. Cette image a été véhiculée par les services secrets russes et les crédules occidentaux l’ont gobée.
J’accorde du crédit au rapport d’Alexander Mercouris sur l’histoire de Wagner, à savoir qu’il a été créé sous la direction du service de renseignement militaire russe, le GRU, et de la version russe du FBI, le FSB. En d’autres termes, Wagner s’apparente davantage à la Division des activités spéciales de la CIA (SAD), qui est le bras militaire de la CIA, et à la Légion étrangère française. Wagner, à mon avis, n’est pas sous le contrôle opérationnel de Prigojine. Il est non seulement un maître de l’art culinaire, mais aussi un sacré bon acteur. Prigojine présente au monde l’image d’un homme au bord de la folie et de la mégalomanie, et les agences de renseignement des États-Unis et d’autres pays de l’OTAN s’en régalent.
Wagner est une unité d’infanterie légère spécialisée dans la formation de soldats et de combattants étrangers. Tout comme le SAD de la CIA, Wagner est dirigé par d’anciens officiers et sous-officiers de l’armée russe en service actif. Mon ami Andrei Martyanov note à juste titre que si Wagner est spécialisée dans le combat urbain, elle n’est pas organisée ni équipée pour opérer en tant qu’unité d’armes combinées. Toutefois, outre ses capacités en matière de combat urbain, Wagner joue également un rôle dans la guerre de l’information menée par la Russie contre l’Occident.
Il est également important de comprendre que Prigojine s’attribue également le mérite de la création de l’Internet Research Agency alias IRA, que les médias décrivent comme « une ferme à trolls notoire que le gouvernement des États-Unis a sanctionnée pour avoir interféré dans les élections américaines. »
Prigojine n’est que trop heureux de s’attribuer le mérite de l’IRA. Il a publié le communiqué de presse suivant en février :
« Je réagis avec plaisir », a déclaré Prigojine dans le communiqué. « Je n’ai jamais été que le financier de l’Internet Research Agency. Je l’ai inventée, je l’ai créée, je l’ai gérée pendant longtemps. Elle a été fondée pour protéger l’espace d’information russe de la propagande agressive et grossière des discours anti-russes de l’Occident. »
Quoi d’autre ? Prigojine a-t-il secrètement créé et financé ROSATOM ou l’Agence spatiale russe ? Il n’est pas facile de préparer une omelette savoureuse lorsqu’on est occupé à mettre sur pied une organisation de mercenaires militaires et une opération d’information sur Internet. Prigojine est le nouveau Beria, sans les comportements sexuels déviants, ou du moins c’est ce que l’on veut nous faire croire. Ou peut-être est-il la version russe du général Patton.
La plupart des Américains ont adhéré au mythe du général Patton, le général que les nazis et la Wehrmacht craignaient le plus :
« Le film Patton et la biographie sur laquelle il est en partie basé, « Patton : Ordeal and Triumph », de Ladislas Farago, on a l’impression que le haut commandement allemand a passé la plupart de ses heures de veille à se préoccuper de Patton et de ses allées et venues. Selon Farago, après sa campagne en Sicile, Patton était le général allié que les Allemands considéraient comme « leur adversaire le plus dangereux sur le terrain », ce qui les amenait à surveiller ses allées et venues « comme des spectateurs au cou élastique suivant une balle de tennis à Wimbledon ». Le problème, note Yeide, c’est qu’« il ne semble pas y avoir un iota de fait derrière cette affirmation ». »
On ne peut pas en dire autant de Prigojine. Il est l’objet d’une obsession dans les médias occidentaux et chez de nombreux dirigeants politiques. Les récents débordements très médiatisés de Prigojine, notamment les diatribes chargées d’injures lancées contre les chefs militaires russes, ont fait naître l’espoir dans les milieux militaires et du renseignement de l’OTAN que peut-être, juste peut-être, le cercle intérieur de Poutine commence à s’effondrer et que la Russie n’est vraiment rien d’autre qu’une station-service dotée d’ogives nucléaires.
Je ne crois pas aux coïncidences. Le fait que Prigojine soit lié si publiquement à une organisation militaire et à une opération d’information sur Internet, qui sont toutes sous le contrôle des services de renseignement russes, m’amène à penser qu’il est un acteur important de la campagne russe visant à tromper l’Occident et à le désorienter quant à ses véritables plans et objectifs militaires. La semaine dernière, Prigojine a fait de son mieux pour convaincre les pays de l’OTAN que Wagner était dans les cordes et confronté à un risque réel d’être envahi par des troupes ukrainiennes nouvellement énergisées et approvisionnées. C’était à l’époque.
Aujourd’hui, selon Prigojine ?
« … Les unités de Wagner ont progressé jusqu’à 130m à l’intérieur et autour de ce que l’on appelle le « Nid ».
Les groupes d’assaut de Wagner ont occupé 91 000 mètres.
1,69 kilomètres carrés de Bakhmout restent sous le contrôle de l’ennemi.
9 gratte-ciels ont été libérés au cours de la journée, 28 gratte-ciels sont sous notre contrôle, 20 sont sous le contrôle de l’ennemi.
Les groupes d’assaut poursuivent leurs tâches en vue de la prise finale de Bakhmout, et travaillent également sur les flancs, où ils ont dû rester pour stopper les tentatives de percée. »
Oui, c’est le type qui, selon le Washington Post, négocie secrètement avec l’Ukraine pour vendre les Russes. Vous comprenez maintenant pourquoi je brandis le drapeau Foutaises ?
source : A Son of the New American Revolution
traduction Réseau International
https://reseauinternational.net/que-penser-de-prigojine-et-du-groupe-wagner/
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