Nous sommes à Saint-Aubin-en-Bray (Oise). Vincent Verschuere, à la tête d’un cheptel de 260 vaches, reprend la ferme familiale. « Je représente la quatrième génération », affirme-t-il fièrement à Oise Hebdo. Installé en 2009, il se souvient : « À cette époque, on devait répondre aux nouvelles normes européennes. On a regardé si on pouvait faire des modifications sur les bâtiments existant, mais ils dataient des années 70, ce n’était pas possible. On a donc cherché un nouveau terrain pour installer nos vaches laitières, en vain. »
Faute de réponse de technocrates ne sachant pas forcément faire la différence entre un radis et un topinambour, un hamster ou un cheval de trait, la famille Verschuere renonce à agrandir les bâtiments existants pour en construire deux autres, de 1.257 et 1.550 m2, sur l’un de ses terrains, jouxtant le village. La réglementation en cours stipule que ces étables ne doivent pas se trouver à moins de cent mètres des habitations les plus proches. Ces dernières ne sont distantes que de quarante mètres. Pourtant, le permis de construire est accordé, personne, parmi les riverains, n’y trouve rien à dire et les travaux peuvent enfin commencer, fort d’une dérogation préfectorale. En 2010, les urbains n’ont pas encore envahi les campagnes et les fonctionnaires locaux savent faire preuve de bon sens, n’ignorant pas qu’on ne sent pas plus l’odeur d’une vache qu’on entend ses meuglements à cent qu’à quarante mètres.
Deux ans après, de nouveaux habitants commencent à se plaindre. Les pauvres… on ne leur avait jamais dit qu’une vache, ça fait « meuh » et que ça ne fleure pas toujours l’infusion de quinoa au jus de gland. À croire que de cet aimable mammifère, qui nous nourrit de sa viande, nous abreuve de son lait et dont le cuir fait d’assez jolis souliers, ils ne connaissaient que sa lointaine cousine, toute violette, sur les tablettes de chocolat.
Du coup démarre une procédure qui va durer plus de dix ans. Ainsi six riverains portent-ils plainte en 2013 « pour nuisances sonores et olfactives » (en clair, le bruit et les odeurs), parvenant à obtenir du tribunal d’Amiens l’annulation du permis de construire. Cinq années plus tard, Vincent Verschuere est à nouveau condamné pour « troubles anormaux du voisinage » par le tribunal de Beauvais, cette fois.
On imagine les jours d’angoisse et les nuits sans sommeil de ce pauvre paysan. Les paperasses administratives comme judiciaires, les banquiers qui menacent de ne plus suivre, les regards pesants de certains voisins. Le 8 mars 2022, la cour d’appel d’Amiens confirme la condamnation prononcée par le tribunal de Beauvais. Résultat ? Vincent Verschuere doit payer 106.000 euros de dommages et intérêts aux six plaignants. Dans son malheur lui parvient néanmoins une bonne nouvelle : il a reçu une avance de 40.000 euros du conseil régional des Hauts-de-France, mais qu’il devra malgré tout rembourser. Ce à quoi s’ajoute un prêt bancaire de 60.000 euros, lui aussi évidemment remboursable. Bref, il n’aura pour le moment réussi qu’à repousser l’échéance.
Il lui restait un dernier espoir : que la Cour de cassation lui donne enfin raison. Las, ce jeudi 14 décembre, cette instance a rejeté son pourvoi. Heureusement, l’homme n’est pas seul. Interrogé par Le Parisien, ce 14 décembre, Luc Smessaert, vice-président de la FNSEA, affirme : « Se battre pour Vincent aujourd’hui, c’est cultiver l’âme de nos campagnes demain. […] La semaine dernière, on a mis un genou en terre. Là, on va se serrer les coudes pour montrer qu’on est tous derrière Vincent, qu’on ne le lâchera pas. »
Rendez-vous a donc été pris pour jeudi prochain, à 11 heures 30, devant la préfecture de Beauvais, sur la place des Maréchaux. À cette manifestation de soutien devraient se rendre Nadège Lefebvre, présidente LR du département, ainsi que Xavier Bertrand, son homologue du conseil régional des Hauts-de-France. Fortuitement, Le Parisien semble avoir oublié que les élus du Rassemblement national seront évidemment de la partie, n’ayant pas été les derniers à apporter leur soutien à cet infortuné paysan. Interrogé par nos soins, Alexandre Dufosset, conseiller régional des Hauts-de-France et directeur de cabinet de Sébastien Chenu, vice-président RN de l’Assemblée nationale, confirme : « J’y serai, en compagnie de Sébastien Chenu et de tous les cadres et militants RN locaux et même d’ailleurs. Son combat est le nôtre. »
Nicolas Gauthier
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