Des juges au service de Dieu ou des Anglais ?
Après sa capture par les Bourguignons à Compiègne, Jeanne est vendue aux Anglais. Ces derniers sont heureux d’avoir enfin entre leurs mains leur si terrible ennemie. Désormais, ils vont pouvoir défaire et salir tout ce que la Pucelle a pu faire pour la France, notamment le sacre de Charles VII. En effet, faire reconnaître la jeune fille comme une envoyée du diable et non de Dieu ne pourra, ainsi, que délégitimer le règne du roi de France au profit de celui du roi d’Angleterre. Pour cela, il faut que ce soit l’Église qui soit juge de l’affaire. On réunit alors 120 ecclésiastiques dont des abbés, des chanoines, des prêtres, des théologiens qui, sous la pression et la menace de l'Anglais, ne devront faire qu’une seule chose : faire condamner Jeanne d’Arc pour hérésie. Le procès s’ouvre ainsi le 9 janvier 1431 sous la présidence de l’évêque de Beauvais, Pierre Cauchon.
Une accusée éloquente
Lors des interrogatoires, Jeanne d’Arc fait preuve d’une très grande finesse dans ses réponses. En effet, ses accusateurs testent sa foi et sa pratique religieuse. Lorsque Cauchon lui demande de réciter la prière du Notre Père, la Pucelle lui répond : « Entendez-moi en confession, et je vous le dirai volontiers », renvoyant son détracteur à son rôle d’homme de Dieu. On lui demande : « Dieu hait-il les Anglais ? » Ce à quoi répond Jeanne, en rappelant sa sainte mission : « De l’amour ou de la haine que Dieu a pour les Anglais, je n’en sais rien ; mais je sais bien qu’ils seront tous boutés hors de France, exceptés ceux qui y périront. » Plus tard, à la question « Savez-vous si vous êtes en la grâce de Dieu ? », Jeanne répondra : « Si je n’y suis, Dieu m’y mette ; et si j’y suis, Dieu m’y tienne. Je serais la plus dolente du monde si je savais n’être pas en la grâce de Dieu. Et, si j’étais en péché, je crois que la voix ne viendrait pas à moi. » L’assemblée reste stupéfaite face à une telle repartie et ne sait comment faire avancer et conclure le procès.
Le problème des vêtements
Le tribunal, embourbé dans un procès qui dure trop longtemps au goût des Anglais, va alors changer d’angle d’attaque et manigancer un piège contre la Pucelle. Si on ne peut la prendre réellement à défaut par les règles célestes, cela se fera par les règles terrestres. Ainsi, les juges de Jeanne vont l’accuser de porter des habits d’homme qu’elle refuse d’abandonner à la suite d’une agression dans ses geôles après avoir pourtant accepté de porter d’autres vêtements plus féminins. Constatant cela, le tribunal peut enfin l’accuser de relapse et apporte ses propres conclusions sur Jeanne en la jugeant officiellement comme hérétique et affabulatrice. Elle est ainsi condamnée à mort par le feu du bûcher.
La fin d’une épopée
Ce 30 mai 1431, Jeanne est emmenée à la place du Vieux-Marché de Rouen où a été dressé un bûcher. Installée face à ses accusateurs et attachée à un poteau de bois, elle disparaît ainsi dans les flammes. Ses restes sont jetés dans la Seine afin qu’aucun culte de ses reliques ne puisse être fait et pour que toute trace de la Pucelle d’Orléans disparaisse à la face des hommes. Cependant, selon la légende, on dit que s’il vous arrive de naviguer sur le fleuve et de passer sous les ponts de la cité, si vous tendez suffisamment l’oreille, vous pouvez entendre le cœur de Jeanne battre encore pour l’éternité.
Si aujourd’hui Jeanne d’Arc, réhabilitée en 1456 puis canonisée en 1920, est l’un des symboles de la France et de son unité nationale, c’est peut-être parce que, selon Jacque Bainville, « grâce au mouvement national que son intervention avait déterminé, le retentissement et l'horreur de son martyre réalisèrent son vœu » car « une des grandes idées de Jeanne d'Arc avait été la réconciliation des Français ». En effet, 22 ans après son sacrifice, en 1453, la guerre de Cent Ans prenait fin après plus de 116 longues années de conflits et d’occupations de la France par les Anglais.
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