jeudi 24 octobre 2024

De l’impuissance hypersonique

 Le journaliste indépendant Drago Bosnic nous met au courant des dernières péripéties de la prodigieuse impuissance US à fabriquer des engins hypersoniques alors que la Russie (et d’autres, dont l’Iran) utilise de telles machines en combat.  Depuis l’alerte de mars 2018 (l’annonce de Poutine de la possession d’armes hypersoniques par la Russie), le Pentagone galère en vain, en rechignant et sans succès.  Les USA sont-ils devenus impuissants dans cette matière du technologisme ?  Préfèrent-ils les ‘blockbusters’ de Hollywood ?

Le texte ci-dessous ne nous apprend rien de nouveau mais il nous fournit des précisions fort utiles sur le développement d’une situation de complet blocage. Cela fait plusieurs années que nous en parlons, d’ailleurs depuis l’annonce par Poutine de l’existence des programmes russes de missiles hypersoniques. Nous en parlions encore récemment dans le sens de l’amplitude et de la gravité de la catastrophe pour les USA, en mars 2023 et en janvier 2024.

Dans son texte ci-dessous, le journaliste indépendant Drago Bosnic, critique politique antiSystème et aussi expert militaire qui aborde parfois des sujets plus techniques dans des domaines où il est très compétents, met en évidence la catastrophe qui frappe le Pentagone avec  ce blocage sur l’hypersonique. On ne parle plus seulement de retard sur les Russes mais quasiment de blocage.

Dans le texte de mars 2023, nous commentions le dernier échec et l’abandon du programme AGW-183A (le projet de missile hypersonique le plus avancé), également connu sous l’acronyme ARRW que les habitués surnomment évidemment ‘Arrow’ (flèche). C’est ce même programme déjà deux fois abandonné, dont Bosnic annonce la relance simplement parce qu’il n’y a rien d’autre à se mettre sois la dent.

Nous commencions notre texte par ce paragraphe que nous jugions sans doute moqueur ; tentative, dans tous les cas, d’un exercice d’un peu d’ironie entre Hollywood et le Pentagone (sur fond de liquidation des ‘Native Américains’) :

« L’USAF a annoncé qu’elle abandonnait l’un des deux programmes (connus) de missiles hypersoniques US, le AGM-183A, connu aussi sous sa désignation de ‘Air-launched Rapid Response Weapon’ (ARRW). L’acronyme étant fort proche de ‘Arrow’ (flèche) comme on le prononce, on en arrive au stade du film fameux “La flèche brisée (1950), qui contait l’histoire malheureuse du fameux chef indien Cochise. Aux USA, on est donc toujours proche de l’hollywoodisme, mais cette fois tout le contraire de l’allure triomphante, – et le destin de l’ARRW étant peut-être une sorte de revanche posthume de Cochise. L’abandon du programme marque en effet un très sérieux revers dans le développement des armes hypersoniques aux USA, ceux-là qui accusent déjà un terrible retard sur la Russie et la Chine. »

La relance de l’ARRW après ses ignominieux échecs et ses abandons catégoriques constituent un cas extrêmement rares, rarissimes pour la bureaucratie du Pentagone, en même temps qu’une timidité prononcés des géants de l’armement pour se lancer dans de nouveaux programmes hypersoniques (le ARRW est fabriqué par Lockheed Martin).

Un peu plus loin, alors que nous nous interrogions sur le sort du technologisme, surtout aux USA où il constitue une force considérable dans la pensée et le développement de cette puissance, surtout dans les forces armées toujours en pointe dans ce domaine et désormais confrontées à des problèmes qui s’avèrent quasiment insurmontables. Ainsi remarquions-nous à propos du technologisme, du Pentagone, et subrepticement de Hollywood :

« Le problème est qu’il faut en effet situer cet échec [du technologisme de l’hypersonique] dans une continuité où l’on trouve l’aventure catastrophique du JSF, celle de la frégate démente DDG-1000 classe ‘Admiral Zumwalt’, de la nouvelle classe des super-porte-avions (‘George Bush’, ‘Gerald Ford’, ‘George Washington’, etc.) affectés d’ennuis de très-haute technologie divers et variés, etc. Le problème est donc de savoir si la superpuissance US a encore la capacité de développer des systèmes de haute technologie compatibles avec la réalité d’une vérité-de-situation de guerre, ou si l’on en reste au stade du triomphe de la communication, pour directement passer à la suite... »

La question que nous nous posons à partir de ces remarques où il est fait allusion à Hollywood et à l’hollywoodisme, c’est-à-dire à tout ce qui développe la communication la plus envahissante et la plus spectaculaire dans la transmission au public des “merveilles” nés du technologisme, si cet appel à la communication n’a pas envahi les esprits et les conceptions des gens du Pentagone et aussi des autres secteurs de la sécurité nationale (le complexe de l’armement, les agences de renseignement). Cela reviendrait à concevoir les technologies, non plus comme un moyen direct de fabriquer des armements, mais comme un moyen de mettre le technologisme au service de la communication, notamment hollywoodienne. Par exemple, on sait que le F-35 (JSF) a déjà été largement utilisé dans des ‘blockbusters’ d’Hollywood, notamment sur les ‘super-héros’, qui fournissent aujourd’hui l’essentiel de la production hollywoodienne ; cela suffit au Pentagone pour la promotion de l’avion, bien plus qu’une aventure israélienne en Iran, où Israël pourrait perdre quelques F-35 (c’est une des craintes secrètes du Pentagone et de l’USAF).

Mais le cas de l’hypersonique est complètement différent parce que les Russes ont 15 à 20 ans d’avance, des missiles de deux générations d’hypersoniques déjà en service, qu’on a vus être utilisés en combat en Ukraine, et peut-être même de la part des Iraniens. Pour ce cas, le Pentagone n’évolue plus dans le seul cadre d’Hollywood où les scénaristes assurent au technologisme bien entendu américaniste une part glorieuse d’efficacité et de succès. C’est ce que nous voulions suggérer avec ce membre de phrase :

« ... Savoir si la superpuissance US a encore la capacité de développer des systèmes de haute technologie compatibles avec la réalité d’une vérité-de-situation de guerre... »

Il semble bien qu’avec l’Ukraine, et la façon dont on a présenté et “suivi” (!) cette guerre, le Pentagone et ses divers complices comme par exemples les industries de l’armement bien-heureuses de produire toujours la même chose pour la satisfaction de Zelenski et la stabilité de leurs bénéfices, ont montré combien la réalité, – c’est-à-dire la vérité-de-situation, – ne les intéressait plus. L ‘hypersonique est donc pour eux tous un affreux problème, un calvaire qu’il faut tout de même tenter de porter puisque les Russes l’ont et que pourtant les USA ne peuvent être que les plus forts et rien d’autre...

Ce genre de dilemme d’une hyper-puissance transformée en surpuissance-Fantasy, est un signe incontestable de l’accélération formidable de la décadence, d’effondrement en effondrement, avec au terme l’attrait irrésistible du plus grand de tous les ‘blockbusters’ : son autodestruction. Rien ni personne ne parviendra à les en relever.

dedefensa.org

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Hypersonique : on recycle les ratages

Il y a un peu plus de dix ans, la plupart des experts militaires étaient convaincus que les États-Unis étaient le meilleur acteur dans le domaine des armes hypersoniques. Le complexe militaro-industriel américain (MIC) sous-estimait obstinément les avancées russes, en particulier en ce qui concerne le système ‘Iskander’, dont les missiles 9M723 ont été les premières armes hypersoniques basées au sol, mais étaient encore généralement répertoriés comme des missiles quasi-balistiques.

Le conflit ukrainien orchestré par l’OTAN a démontré la grande manœuvrabilité et la vitesse des armes utilisées par le système de missiles ‘Iskander-M’, prouvant sans l’ombre d’un doute que Moscou a environ 15 à 20 ans d’avance dans le développement et le déploiement des hypersoniques. En revanche, les tentatives de Washington de ridiculiser les avancées russes semblent avoir eu un effet “karmique” sur ses propres performances, car le Pentagone a connu un échec embarrassant après l’autre au cours de la dernière décennie.

Cependant, essayer de dénigrer votre adversaire par le biais de la machine de propagande traditionnelle ne ralentira pas ses avancées technologiques dans le monde réel. Cela pourrait certainement les faire passer pour des méchants (même si ce n’est pas au-delà de l’Occident politique), mais rien de plus. Pourtant, les États-Unis ont continué à le faire. Les affirmations plutôt pathétiques de la machine de propagande dominante selon lesquelles la Russie aurait “volé” des technologies hypersoniques américaines inexistantes sont devenues d’autant plus ridicules que les échecs du Pentagone à développer une seule arme fonctionnelle ont commencé à s’accumuler. Malgré une douzaine de programmes d’armes hypersoniques, les États-Unis n’ont rien à montrer de leurs efforts. En mars de l’année dernière, les choses ont pris une tournure pire après l’annulation du programme AGM-183A, un missile lancé par avion transportant un véhicule de glissement hypersonique (HGV). Surnommé ARRW (Air-Launched Rapid Response Weapon), le missile était censé être le point d’entrée des États-Unis dans le très exclusif “club hypersonique”.

Les échecs du MIC américain ne se sont cependant pas arrêtés là. Son incapacité à fabriquer des armes même relativement basiques (par rapport à son statut de superpuissance) est devenue évidente, ce qui a donné lieu à des épisodes encore plus embarrassants, comme les retards constants et les problèmes technologiques dans le développement des ICBM (missiles balistiques intercontinentaux).

Et pourtant, étant donné le prestige géopolitique de la mise en place d’armes hypersoniques, il était important pour Washington DC de commencer à dissimuler les informations sur les échecs de ses programmes, c’est pourquoi nous n’avons toujours pas de confirmation officielle des résultats du dernier test. J’ai déjà avancé qu’il était très probable qu’il ait échoué, et bien que les preuves définitives ne soient toujours pas là, les événements ultérieurs ont renforcé cette idée. En fait, les dernières révélations sur les intentions des États-Unis concernant la relance de programmes écartés en sont un exemple. Ainsi, le programme avorté AGM-183A avec une ogive HGV pourrait en fait être relancé.

Surnommé le «“Super-Duper” par l’ancien président et actuel candidat Donald Trump, l’ARRW (habituellement lu comme “arrow” [“flèche”]) aurait été le plus loin dans le développement et les tests, du moins selon ‘War Zone’. Cependant, l’arme était tout simplement insuffisante pour égaler les conceptions nord-coréennes et iraniennes, sans parler des avancées chinoises (et, bien entendu, ; sans parler surtout des avancées russes, qui sont dans une ligue à part). Des sources militaires rapportent que l’incertitude entourant l’avenir de l’AGM-183A s’est considérablement exacerbée fin septembre, lorsque l’US Air Force a accordé à Lockheed Martin 13,4 millions de dollars de fonds supplémentaires pour les travaux de R&D sur le programme officiellement annulé. En effet, outre l’abandon susmentionné en mars 2023 (officiellement en raison de « problèmes techniques non spécifiés »), il y a eu une brève période de relance (bien que non officielle), principalement en raison des échecs répétés d’autres programmes. Cependant, le financement de l’AGM-183A a été réduit en mars 2024.

Il s’agit de la deuxième annulation du projet, l’armée américaine promettant qu’elle se tournerait vers d’autres programmes. Le missile a quand même été présenté en Asie-Pacifique dans une “démonstration de force” face à la Corée du Nord et à la Chine, mais cela n’a pratiquement servi à rien, car les véritables résultats d’un lancement d’essai n’ont jamais été publiés (ce qui suggère un nouvel échec), alors que la Corée du Nord et l’Iran ont démontré qu’ils pouvaient construire et déployer ces missiles (avec des rapports solides selon lesquels l’Iran a effectivement utilisé les siens au combat).

Et bien qu’il s’agisse certainement d’une arme efficace sur le papier, le programme AGM-183A est soit très mal exécuté (au mieux), soit les États-Unis n’ont tout simplement pas la technologie nécessaire pour déployer de telles armes. L’arme est équipée d’une ogive HGV, ce qui signifie que le propulseur devrait être le moindre des problèmes du Pentagone, mais il semble que même cette technologie relativement simple constitue un obstacle insurmontable, entraînant des échecs répétés et des dépassements de coûts perpétuels.

Le HGV lui-même constitue le défi technologique le plus complexe, car il nécessite des connaissances de classe mondiale en matière de fusées et de vol plané hypersonique (vol non motorisé). Maintenir une vitesse aussi importante dans les circonstances données est un obstacle majeur, d'autant plus que les missiles balistiques traditionnels perdent de l'élan à mesure qu'ils volent plus loin. Cependant, les HGV sont capables d'utiliser leurs surfaces de portance très avancées pour non seulement maintenir une vitesse hypersonique, mais aussi pour manœuvrer tout en le faisant.

La Russie a maîtrisé cette technologie  avec son programme ‘Avangard (anciennement également connu sous le nom de Yu-71 et Yu-74), atteignant des vitesses maximales stupéfiantes allant jusqu'à Mach 28 (près de 10 km/s ou plus de 33.000 km/h), ainsi qu'une portée intercontinentale (de 6 000 à 18 000 km), ce qui en fait la seule arme hypersonique stratégique au monde. D’un autre côté, l’ARRW, qui a échoué, est censé être un équivalent opérationnel des systèmes 9-A-7660 ‘Kinzhal’ armés de missiles hypersoniques 9-S-7760 lancés par avion.

Le Pentagone a présenté l’AGM-183A comme une arme soi-disant « plus avancée » que le ‘Kinzhal’. Ce dernier n’est pas seulement une arme existante, il a également prouvé ses capacités au combat, ce que le missile de fabrication américaine ne peut même pas égaler dans des environnements de test hautement contrôlés. Ce qui devait « changer la donne » était censé donner à l’armée américaine « des options de frappe sans précédent » et devait être transporté à la fois par des avions stratégiques tels que les bombardiers B-52, ainsi que par des jets tactiques tels que le F-15. Cependant, les échecs répétés du Pentagone ont entraîné une baisse de financement toujours plus importante. Longtemps attendue comme la première arme hypersonique de tout arsenal occidental, son bilan de tests « problématique » a forcé l’USAF à chercher des alternatives. Il y a même des spéculations selon lesquelles ce  programme en difficulté se transformera en un autre appelé Tactical Boost Glide (TBG), ce qui indique que l’arme aura très probablement une portée beaucoup plus courte que celle prévue pour l’AGM-183A.

Ce dernier était censé être transporté par des bombardiers B-52, tandis que l’intégration était également prévue pour les nouveaux avions de chasse F-15EX, le seul avion tactique occidental capable de déployer des missiles de cette taille. Cependant, si le TBG finit par avoir des caractéristiques plus modestes (ce que le nom lui-même suggère certainement), ce missile pourrait également être transporté par d’autres avions tactiques, à condition qu’il soit un jour déployé.

Cependant, le fait même que les États-Unis envisagent sérieusement de recycler le programme ARRW qui a déjà été annulé deux fois en raison de coûts excessifs, de manque de fiabilité, d’échecs répétés aux tests, de l’absence de progrès dans l’amélioration de la conception, etc., tout cela est très révélateur. Comme tous les autres programmes ont échoué, les États-Unis sont désormais désespérés d’au moins égaler les puissances régionales précédemment mentionnées comme la Corée du Nord et l’Iran. De plus, ce dernier a très probablement également donné ses missiles hypersoniques à des alliés au Moyen-Orient (plus précisément au Yémen), rendant l’embarras de l’Amérique encore plus grand.

Drago Bosnic

mardi 22 octobre 2024

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« La Russie n’est qu’une grande station-service »

Alors que plusieurs pays occidentaux continuent d’infliger de lourdes sanctions à la Russie, l’ancien conseiller du président Barack Obama et économiste à Harvard Jason Furman estime que l’économie russe est « incroyablement insignifiante dans l’économie mondiale », à l’exception de ses ressources en pétrole et en gaz. « C’est essentiellement une grande station-service », a-t-il poursuivi.

Hannibal Genséric

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