NANTES (NOVOpress Breizh) - Le 10 octobre 1997,
Lionel Jospin, Premier ministre, annonçait le dépôt d’un projet de loi
concernant la réduction du temps de travail, au nom de la lutte contre
le chômage et du progrès social. Il revient naturellement à Martine
Aubry, ministre du Travail et de l’Emploi, de mettre en musique cette
grande affaire. Les 35 heures deviennent la durée légale du travail au
moyen de deux lois votées en juin 1998 (Aubry 1) et en décembre 200
(Aubry 2).
Cette réforme a un impact immédiat sur les finances publiques. En
effet les aides que le gouvernement a dû mettre en place pour alléger,
au niveau des bas salaires, la charge des 35 heures payées 39 ont bien
pesé sur le déficit, et lourdement. Ces allègements de charges sociales
atteignaient 10,5 milliards d’euros par an dès 2002. En 2007 on passait à
12 milliards.
Une étude de l’INSEE assure que les lois en question ont permis la
création d’environ 350.000 emplois entre 1998 et 2002. Grâce à la
réorganisation du travail, aux allègements de cotisation sociale et à la
modération salariale, les 35 heures n’auraient pas engendré de « risque
de dégradation de la compétitivité et du profit des entreprises » (Le Figaro, 31/10/12).
L’UMP a rapidement fait de l’abolition des 35 heures son cheval de
bataille. Ainsi, pendant sa campagne électorale de 2007, Nicolas Sarkozy
y voit une « erreur économique énorme ». C’est aussi l’occasion pour lui de souligner que « les 35 heures, c’est la régression sociale ». « On ne tient plus le coup. Les 35 heures, tel que cela existe aujourd’hui, c’est intenable », ajoute Jean-François Copé. Il serait facile d’aligner les phrases anti-35 heures prononcées par les leaders de la droite.
Leur force de conviction étonne, leur absence de mémoire désespère.
Là encore la preuve est apportée qu’en politique on peut raconter
n’importe quoi sans craindre de se voir « recadrer ». En effet,
l’invention des 35 heures revient à Gilles de Robien (photo en Une)
(UDF), ministre du Travail (1995-1997) à une époque où le président de
la république s’appelait Jacques Chirac et le Premier ministre Alain
Juppé.
La loi de Robien reposait sur le volontariat. Les entreprises
intéressées signaient une convention avec l’Etat ; bien entendu le texte
prévoyait un allègement des charges sociales patronales – compensation
oblige – puisque les 35 heures se voyaient rémunérées 39. Les grandes
entreprises employant un personnel nombreux travaillant à la chaîne
comprirent l’intérêt qu’elles pouvaient retirer de cette innovation. En
combinant gains de productivité et aides de l’Etat, l’opération se
révélait blanche, voire profitable. Trouvant la recette formidable,
Martine Aubry la systématisa, l’étendant aux PME, à l’Administration et
aux hôpitaux ; les 35 heures devinrent obligatoires.
Longtemps député-maire d’Amiens, en Picardie, le giscardien Gilles de
Robien a aujourd’hui disparu de la scène politique. Candidat malheureux
au poste de directeur général du Bureau International du Travail (BIT)
en mai dernier – il avait reçu l’appui de François Hollande – il a été
élu pour une année président du conseil d’administration du même BIT le
15 juin. Lot de consolation, il est également depuis 2007 « ambassadeur
chargé de la cohésion sociale ».
Yves Cadic http://fr.novopress.info
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