Gouverner par le chaos - Ingénierie sociale et mondialisation est un ouvrage anonyme qui s‘intéresse aux méthodes de contrôle des masses au sein de nos « démocraties » occidentales.
Un point de départ : Tarnac
L’ouvrage s’inspire de l’Insurrection qui vient,
publié en 2007 par le Comité invisible et qui fut au cœur de
l’actualité lors de « l’affaire de Tarnac ». Cette affaire
politico-médiatique fut l’occasion pour le gouvernement de droite, alors
au pouvoir, de contrer une pseudo-menace terroriste issue des rangs de
l’ultra-gauche suite aux sabotages de caténaires de la SNCF.
Ainsi l’auteur* du
présent ouvrage estime que des techniques de manipulations furent à
l’œuvre lors de cette affaire et élargit son propos sur un certain
nombre de techniques mises en place dès le début du XXe siècle mais qui
pourraient même remonter à des temps plus anciens, ainsi il cite Sun Tzu
qui considère que « Tout l'art de la guerre est basé sur la duperie ».
C’est donc dans une
société qui méprise la réalité, qui fonctionne sur le mensonge que nous
serions en train de vivre. Le chaos ne serait donc plus ce que rejette
le gouvernement, mais ce qui lui permet de se maintenir au pouvoir et
d’accroître sa capacité de contrôle. Nous pouvons songer à quelques
exemples récents : l’insécurité est un moyen de justifier la mise en
place de la vidéo-surveillance, la loi anti-burqa un moyen d’empêcher
tout individu de se masquer le visage, le téléchargement illégal un
moyen de justifier le contrôle d’internet, l’usurpation d‘identité une
justification à la mise en place les passeports biométriques, le vol
favorise le pouvoir des banques (qui gardent l’argent) et l’utilisation
de la carte bancaire (munie d’une puce électronique), etc… L’ouvrage
démontre aussi rapidement que la crise actuelle est une volonté
politico-financière pour augmenter le contrôle social et politique de la
finance (ce qui rejoint l’analyse de Michel Drac) comme ce fut toujours
le cas et la prise de contrôle de certains organismes financiers (comme
JP Morgan, ce qui rejoint ici l’analyse de Pierre Jovanovic).
L’homme : une machine comme une autre
En décryptant
l’ingénierie sociale, l’auteur nous démontre que les apprentis-sorciers
du Nouvel Ordre Mondial considèrent l’être humain comme une machine que
l’on peut reprogrammer à souhait en usant d’un certain nombre de
techniques. Pour ce faire, différentes disciplines sont employées dans
le domaine politique ou médiatique pour manipuler l’opinion : « le
marketing, le management, la robotique, le cognitivisme, la psychologie
sociale et behaviouriste (comportementale), la programmation
neurolinguistique (PNL), le storytelling, le Social Learning, le
reality-building. » (p.19)
C’est un véritable
musée des horreurs que dépeint l’ouvrage où toutes les stratégies les
plus machiavéliques sont mises au point pour manipuler et contrôler les
populations en recourant le moins possible à la violence. L’auteur
n’hésite pas à utiliser les termes de « piratage » et de « hacking »
pour parler de processus visant à modifier totalement, voire à violer,
l’esprit et la pensée des individus. Le terme d’ « ingénierie sociale »
qui fait l’objet d’un chapitre et qui revient fréquemment est d’ailleurs
assez révélateur puisque théoriquement l’ingénieur travaille sur des
machines, du « non-vivant » alors qu’il s‘agit pour ceux qui nous
gouvernent de travailler sur des êtres vivants. De fait, nous ne sommes
pas surpris à la fin de l’ouvrage de lire quelques considérations sur le
transhumanisme dans le chapitre « Le biopouvoir ».
Le refus des limites
et la volonté de dissoudre non seulement tous les groupes humains, mais
l’Homme lui-même semble être l’objectif du Nouvel Ordre Mondial. Une
société de zombies reprogrammés par la pensée unique et dirigés par un
gouvernement global au sein du « village global ». L’auteur n’est
absolument pas dupe de cette volonté affichée par certains individus
comme Attali, Minc ou Brzezinski (mentionnés dans le livre) et n’hésite
pas à montrer les dangers qui nous guettent à voir se dissoudre la
famille, le clan, la tribu ou la nation. Il considère que la frontière
est essentielle à l’être humain dans son acception polysémique. C’est
l’introduction du chapitre Tittytainment qui attire ici notre attention : « Les architectes** de la mondialisation l’ont parfaitement compris : pour être vraiment efficace, la fabrique du consentement [NDLR : titre chapitre précédent]
suppose l’abolition de toutes les frontières. En effet, c’est le
maintien de frontières, à tous les niveaux de l’existence, qui rend
possible la comparaison, la contradiction, la possibilité de dire
« non » et tout le jeu de la dialectique qui s‘ensuit. C’est aussi le
maintien de frontières qui appuie le protectionnisme économique,
nécessaire si l’on souhaite conserver l’autonomie matérielle et
l’indépendance intellectuelle qu’elle permet. » Nous ne pouvons que
souscrire à cette réflexion. Dans un autre passage du livre, l’auteur
poursuit ce raisonnement à propos du corps humain. La peau (l’épiderme)
est la frontière entre l’intériorité et le monde extérieur,
l’environnement, cette « frontière naturelle » est ce qui permet à
chacun de conserver une part de secret, et c’est cette part de secret,
constitutive de notre identité, et source d’imprévu, qui est intolérable
pour le Système, qui cherche donc à valoriser au maximum la mise en
place de l’identité numérique. Nous ne pouvons que nous désoler de voir
autant de prétendus « militants radicaux » épancher leurs faiblesses de
cœur ou revendiquer leurs actions sur certains réseaux sociaux, ce qui
constitue du pain béni pour le Système qui n’a plus qu’à se créer un
simple compte pour contrôler, se renseigner, faire pression et agir.
Je considère souvent
que ce « refus des limites », des frontières, propre à certaines
mouvances « politiques », est le signe d’un esprit profondément puéril,
celui de l’enfant refusant l’interdit et refusant les règles. Je suis
donc assez satisfait de lire dans cet ouvrage un certains nombres de
pages bien menées qui montre que le Nouvel Ordre Mondial a besoin
d‘infantiliser les populations, de les faire revenir à un stade
préœdipien. Songeons à l’usage en politique du terme « pédagogie », qui
signifie étymologiquement « l’art d’éduquer les enfants », et montre la
façon dont nous sommes considérés par nos gouvernants. Cette
infantilisation, doublée d’une forte individualisation, contribue à
l’effritement du groupe et à l’abaissement des capacités de
raisonnement, et donc à l’abandon du politique.
Le chapitre intitulé
« La théorie de la jeune-fille » est à ce titre fort intéressant et
oppose des principes jeunistes et féministes (encouragés par le NOM***) à
des principes hiérarchiques et phalliques. Exprimé ainsi, cela peut
paraître un peu « caricatural », je vous invite donc à vous plonger dans
ces quelques considérations. Ce chapitre fait suite à celui sur le
« Management négatif » qui se conclut entre autre par les théories de
Lacan : « Chez Lacan, les
groupes humains peuvent se comprendre dans les termes de la logique
ensembliste, ou théorie mathématique des ensembles. Lacan distingue au
moins quatre modes d’organisation, modes relationnels qu’il appelle des
discours : le discours du maître, où le chef domine : le discours de
l’hystérique, où l’individu domine : le discours universitaire, où le
savoir domine : le discours analytique ; où l’incertitude domine. (Lacan
a aussi mentionné une fois dans œuvre un cinquième discours, celui du
capitaliste, qui nous semble être une variante de celui de
l’hystérique). La formation d‘un ensemble humain, donc l’organisation
d’un groupe, requiert de soumettre les individus à une hiérarchie
verticale, à un discours du maître, une autorité, une Loi, un phallus
symbolique en position d’exception par rapport aux membres du groupe. »
Pour ma part, et à la suite de certaines réflexions au sein de
l’ouvrage, il me semble important que le discours du maître soit soutenu
par le discours du savant.
Au-delà du constat,
auquel je souscris pleinement, j’adhère à une bonne partie des
réflexions formulées par l’auteur. Cependant certains aspects sont à
discuter.
Une critique : lutte des classes et question ethnique
Influencé par
l’ultra-gauche, l’ouvrage se fait donc au fur et à mesure un plaidoyer
pour la lutte des classes et s’avère plutôt critique sur la question
ethnique.
Nous ne nions pas la
possibilité d’une lutte des classes, d’ailleurs, la citation du
milliardaire Warren Buffett, présente dans l’ouvrage, est édifiante « Il
y a une lutte des classes, évidemment, mais c'est ma classe, la classe
des riches qui a mené la lutte. Et nous sommes en train de gagner. ».
Pour l’auteur, la question ethnique ferait son irruption dans la
politique française à la suite de l’action combinée à partir de 1983 du
Front national d’un côté, qui exacerberait cette question et de SOS
Racisme de l’autre qui en ferait un nouveau combat social. L’auteur
précise également que la question ethnique n’a jamais eu une grande
importance en France. Le but de cette question « secondaire » serait de
détourner de la lutte des classes. J’apporterai un bémol à ses
réflexions.
Tout
d’abord, il est vrai qu’autant le FN que la gauche et l’extrême-gauche
ont utilisé la question ethnique a des fins électorales. Concernant la
gauche, le rapport récent de Terra Nova est un aveu. La gauche s’est
débarrassée des classes populaires autochtones au profit des « jeunes »,
des homosexuels et des immigrés, groupes sociaux pouvant être
considérés par eux comme des « minorités ». Le tournant libéral de la
gauche coïncide astucieusement avec cette stratégie. Afin de masquer son
« à-plat-ventrisme » face au Capital, la gauche a agité le hochet de
l’anti-racisme. Dans le cas du FN, et dans ce qu’il est convenu
d‘appeler médiatiquement « l’extrême-droite », cette question ne saurait
relever d’un simple « calcul » politique. Historiquement, les
mouvements dits « nationalistes » voire « fascistes » ont toujours
compté une portion congrue de non européens (ce fut le cas lors du 6
février 1934, ce fut le cas au sein du PPF, de la LVF puis après guerre
du PFN ou d’Occident). Le nationaliste français n’a jamais été un
racisme primaire à la sauce amerloque. Cependant, cette question a cessé
d’être secondaire lorsque le Capital a utilisé la main d‘œuvre
étrangère contre la main d’œuvre autochtone. L’afflux de millions
d’allogènes a déplacé cette question « secondaire » (y compris chez les
nationalistes) comme devenant une question centrale. Il est impossible
aujourd’hui de nier, même pour un marxiste ou un anarchiste sérieux, que
la question ethnique est devenue importante, tant elle est facteur de
désordre, désordre voulu pour déstabiliser le « marché du travail »,
autant que la cohésion sociale, ou tout simplement pour créer de
nouvelles formes de « stratégie de la tension » (Occident vs Islam, par
exemple). Dans ce qu’on appelait jadis le Tiers-Monde, la reconquête
contre les puissances coloniales capitalistes est souvent passée par une
quête identitaire (indigénisme sud-américain, souvent catholique,
nationalisme hindou, panarabisme, bouddhisme, etc…). D’ailleurs l’auteur
ne s’y trompe pas puisqu’il considère bien que le NOM veut détruire les
structures traditionnelles… Bien que seulement 1% du livre concerne
cette question, il m’a semblé important de faire quelques commentaires.
Aussi cela prépare une fin qui ressemble à un soufflet au fromage
s’effondrant sur lui-même, un délire sur le CNR et un appel des anciens
résistants (dont les sinistres Aubrac et le médiatique Hessel) à
s’engager (contre le NOM). On peut émettre autant de réserve qu’on veut
sur les régimes totalitaires (particulièrement sur les lobbies
pharmaceutiques et chimiques allemands), cela n’empêche pas de rester
lucide. Comme le montre bien l’auteur, l’essentiel de ce projet
mortifère est un produit des milieux anglo-saxons, et ce bien avant la
Seconde Guerre mondiale. Nous n’avons pas souvenir que les
« résistants » se soient opposés à cette époque, puis au cours de leur
existence à l’influence des milieux anglo-saxons… A l’inverse d’un
certain Ezra Pound, qui l’aura chèrement payé.
En
somme, à l’exception des dernières pages, il s‘agit d’un très bon
ouvrage, essentiel pour comprendre les mécanismes de contrôle et de
programmation de l’esprit humain et le projet du NOM.
*
par commodité j’ai choisi de parler de « l’auteur » au singulier même
si l’ouvrage est peut-être écrit par plusieurs personnes.
**
le choix du terme « architecte » est surement inconscient, mais ne peut
que nous faire sourire, lorsqu’on sait que le rôle que joue le « Grand
Architecte de l’Univers » dans la franc-maçonnerie.
*** NOM = Nouvel Ordre Mondial
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